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Lors de sa conférence de presse, Edouard Philippe a révélé qu’une entreprise sur deux en France bénéficiait du dispositif de chômage partiel. Cela représente 700 000 entreprises, pour un coût à l’heure actuelle de 24 milliards d’euros.

Lors de sa conférence de presse, Edouard Philippe a révélé qu’une entreprise sur deux en France bénéficiait du dispositif de chômage partiel…

Oui, et ça représente 700 000 entreprises, pour un coût à l’heure actuelle de 24 milliards d’euros. Ces chiffres, qui n’avaient jamais été rendus publics, sont véritablement incroyables. Ca veut dire que, de facto, la moitié de l’économie française a été, en tout ou en partie, nationalisée. Comme on le dit à l’Elysée, dans l’entourage du chef de l’Etat, ceux qui sont des fanas de la nationalisation sont servis !... Et tout ça sans compter les autres aides, comme les prêts garantis et qui paraissent très naturels. Comme l’a dit hier le Premier ministre, « il faut sauvegarder ce qui peut l’être, pour pouvoir relancer ensuite ce qui doit l’être ». Sauf qu’en réalité, ça ne peut pas être aussi simple que ça. Jusqu’ici, on s’est tous dit que la France, comme toute l’Europe en même temps qu’elle, et comme les Etats-Unis désormais, était quasiment à l’arrêt. Eh bien cette sorte d’unanimité dans le malheur, elle s’arrête aujourd’hui. L’Allemagne entame ce matin même son déconfinement progressif, d’autres pays dans le monde (la Chine, bien sûr) qui avaient subi la vague de l’épidémie avant nous, en sortent avant nous.

Et donc ils se relancent avant nous…

Exactement. Ce qui peut poser un très gros problème de concurrence, en particulier en Europe. Déjà, les moyens mis en œuvre par les différents pays sont inégaux, ce qui va créer des distorsions. En plus, des entreprises vont se redresser avant les nôtres, des marchés vont se rouvrir avant les nôtres. On risque là de perdre des positions concurrentielles. Ca va être très tendu, et ça commencé à alerter Bruxelles. La Commissaire européenne à la concurrence, Margareth Vestager commence à allumer des clignotants, un peu dans tous les domaines.

Vous publiez justement une interview d’elle ce matin, dans l’Opinion…

Oui, et cette femme, qui s’est taillée une réputation d’intransigeance se montre une fois de plus assez raide. Un exemple : jusque-là, la plupart des autres pays, comme la France, ont ouvert les robinets de l’argent public. La seule contrainte paraissait être la profondeur de la poche des Etats. Pas du tout, rappelle M Vestager : l’argent public ne peut pas être investi n’importe comment dans les entreprises. Et les entreprises dans lesquelles l’Etat aura investi n’auront pas la liberté absolue d’en faire ce qu’elles veulent. Par exemple, elles ne pourront pas racheter de concurrent en difficulté. Pareil pour les relocalisations, sous l’impulsion des gouvernements : elles ne pourront pas être faites n’importe comment. Même chose pour les secteurs considérés comme stratégiques, qui seront différents selon les pays : imaginons l’automobile ou la machine-outil pour l’Allemagne, comment être sûr qu’il n’y aura pas une sorte de dumping au détriment des autres, de nous peut-être ? Edouard Philippe a laissé entendre hier qu’on ne savait pas exactement ce que serait le retour à la vie normale. Pour l’Europe, en tout cas, on sait que ce sera plus difficile qu’avant.