Chaque matin, Nicolas Beytout analyse l'actualité politique et nous livre son opinion. Ce mardi, il revient sur la mise en place des aides de soutien aux entreprises face aux nouvelles restrictions sanitaires dues au variant Omicron.
Bruno Le Maire a annoncé hier que le gouvernement avait décidé d’élargir l’aide aux entreprises touchées par les nouvelles restrictions sanitaires dues au variant Omicron…
Oui, la panoplie est désormais traditionnelle, et elle est connue : chômage partiel indemnisé, compensation de certains coûts fixes et aussi promesse de discussion sur le remboursement des PGE, ces prêts garantis par l’Etat mis en place lors du premier confinement et qui viennent bientôt à échéance, ce qui pourrait mettre en difficulté certaine PME. Voilà, l’expérience de 2 années de pandémie a parlé : c’est net, c’est carré, c’est immédiat, et c’est avantageux. Politiquement avantageux. Cette panoplie de mesures d’aides dégainée par le gouvernement va en effet avoir des effets très concrets sur la campagne électorale. Concrets et positifs pour le gouvernement.
D’abord parce que la réactivité, qui avait tellement manqué lors du début de l’épidémie, est totale cette fois. Et puis, ça permet de remettre en scène la figure du Président protecteur, un statut qui lui profite beaucoup, et sur lequel il joue. Si vous avez, comme moi, regardé les vœux d’Emmanuel Macron avec un chrono en main, alors vous avez remarqué que le Covid avait occupé 9 des 14 minutes de l’allocution télévisée (les 2/3 du temps), et qu’il en a profité pour vanter son action, et la manière dont les Français ont été protégés. C’est un classique en temps de crise grave (et on a eu le même phénomène lors des attaques terroristes sous les quinquennats précédents) : les Français, dans ces cas-là, se tournent vers le chef.
On le voit d’ailleurs dans les sondages : Opinion Way a redonné hier un peu d’avance à Emmanuel Macron dans un éventuel second tour face à Valérie Pécresse : 54/46…
Exactement. J’ajoute que ce retour de l’épidémie valide à point nommé la stratégie du chéquier. Autant l’opposition avait pu, à juste titre, dénoncer les centaines de millions, les milliards distribués cet automne dans des conditions assez clairement électoralistes, autant il lui est difficile de dire aujourd’hui que la combinaison de la cinquième vague Delta et de la déferlante Omicron ne nécessite aucune dépense nouvelle. Difficile, par exemple, pour Valérie Pécresse de continuer à dire que «Macron crame la caisse».
Le sujet est toujours là, bien sûr (et on a par exemple appris hier que la France allait emprunter la somme faramineuse de 260 Mds d’euros pour rembourser une partie de sa dette en 2022). Mais la critique sur la dette est moins audible en ce moment, on ne peut plus la mettre autant en avant politiquement. En somme, et alors même qu’on est lancé à fond dans une campagne électorale décisive, l’opposition est de facto empêchée de se faire entendre.
Il y a tout de même des aspects de cette crise qui ne sont pas un long fleuve tranquille pour le gouvernement. Par exemple le pass vaccinal.
Vous avez raison, il a provoqué des débats agités à l’Assemblée, cette nuit. Mais à la fin, le texte a été voté, le Sénat va le voter et les Français sont majoritairement favorables à cette contrainte du pass vaccinal. C’est un peu plus compliqué pour l’école, domaine fragile par excellence comme tout ce qui touche les enfants dans le cadre de la pandémie de Covid.
Le protocole sanitaire peut être un sujet difficile pour le gouvernement. Autre effet négatif possible de ce retour à grand fracas du Covid dans l’actualité politique : ça empêche les autres sujets d’émerger, alors qu’ils sont très importants pour le débat : je pense aux questions d’identité, de sécurité, ce qu’on appelle le régalien, un domaine où l’action d’Emmanuel Macron est très contestée. Ce silence actuel peut lui profiter à très court terme, mais personne n’a intérêt à ce que ces sujets soient escamotés avant la présidentielle. Ce serait un mauvais coup pour la démocratie.