Présidentielle : la leçon de Montebourg à la gauche

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Chaque matin, Nicolas Beytout analyse l'actualité politique et nous livre son opinion. Ce vendredi, il s'intéresse aux déclarations d'Arnaud Montebourg en vue de la présidentielle l'an prochain. L'ancien ministre du Redressement productif, encore officiellement indécis sur sa candidature, mise sur le "en même temps" et tente de convaincre la gauche que son analyse est la bonne.

Candidat ou pas candidat ? Depuis le début de la semaine, Arnaud Montebourg a alternativement évoqué les deux hypothèses pour la présidentielle de l’an prochain.

Ira, ira pas ? L’ancien ministre du Redressement productif et désormais apiculteur s’est retrouvé comme une abeille droguée au glyphosate qui ne retrouve plus sa ruche. Il a successivement évoqué sa candidature à l’Élysée, puis dit qu’il n’irait pas, puis corrigé en expliquant qu’en l’état actuel, il n’en avait pas les moyens, mais qu’il était disponible. Naturellement, c’est cette dernière version la bonne.

Selon lui, il faut à la gauche une candidature unique.

Et il a raison, c’est la seule petite chance qu’a la gauche d’exister. Mais, au-delà de constat, la théorie développée par Arnaud Montebourg est assez innovante. Pour lui, "le pays est à droite sur le plan régalien et à gauche sur l’économique et le social". Concrètement, ça donne un vibrant plaidoyer pour la lutte contre l’insécurité et pour l’application intransigeante de l’état de droit, pour la lutte contre l’immigration qui, dit-il, "n’est pas sous contrôle et pèse sur les conditions de vie des plus modestes", pour un combat contre l’islamisme politique. Bref un positionnement régalien que personne, à droite, ne renierait.

Et sur le social et l’économie ?

Là encore, un discours qui peut parler à une partie de la droite : contre les hausses d’impôts, contre le mythe de la fin du travail assortie d’allocations universelles, et pour le nucléaire, aussi. Mais, et revoilà l’homme de gauche, Arnaud Montebourg ne s’est toujours pas converti à la maîtrise des dépenses publiques et on le retrouve tel qu’auparavant dans sa défense du protectionnisme et la reconquête de la souveraineté du pays. Ce qu’il vise, c’est une alliance entre une "bourgeoisie d’intérêt général", patrons, hauts-fonctionnaires, commerçants, créateurs, et ce qu’il appelle "une France des déclassés". Les uns traditionnellement plutôt affiliés à la droite, les autres venant de la gauche.

Est-ce que ça ne ressemble pas un peu à du "en même temps" ?

Si, c’est exactement ça, mais un "en même temps" dont le point d’équilibre est nettement moins à droite que celui d’Emmanuel Macron. Ce qui est intéressant dans le positionnement d’Arnaud Montebourg, c’est sa capacité à abattre les totems de la gauche, et à enfourcher sans complexe des thèmes de droite. Pour lui, c’est la seule façon de retrouver le peuple et de troubler ainsi le face-à-face Macron-Le Pen. Autant le dire, la gauche, n’est certainement pas prête aujourd’hui à se reconnaître dans cette analyse et à bousculer ce sur quoi elle a construit son offre politique depuis un siècle. Mais au moins peut-elle écouter la voix originale du trublion Montebourg et, comme on dit, en faire son miel.

 

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