Chaque matin, Nicolas Beytout analyse l'actualité politique et nous livre son opinion. Ce lundi, il revient sur l'allègement du confinement qui devrait être annoncé ce mardi par Emmanuel Macron. Il devrait être bien différent de celui du printemps.
On saura ce mardi soir à quelle vitesse le pays sortira du confinement.
En particulier pour ce qui concerne la réouverture des commerces dits non-essentiels, une terminologie qui s’est révélée être une véritable faute de communication politique. En quelques semaines, les difficultés que le gouvernement leur a imposées sont devenues incompréhensibles pour la plupart. Alors que Noël approche, l’émotion suscitée par le sort des commerçants empêchés de vendre obligeait le pouvoir à réagir. On avait atteint la limite de l’acceptabilité par l’opinion publique.
Le dispositif va donc, selon toute vraisemblance, être allégé. Peut-on dire que c’est un recul du gouvernement ?
Ce qui est sûr, c’est que la période politique est très différente de ce qu’elle était il y a six mois, au sortir du premier confinement. À l’époque, la marque de fabrique d’Édouard Philippe, c’était "droit dans ses bottes". Il représentait le camp de la prudence sanitaire, face à ceux qui voulaient desserrer l’étreinte sur l’économie française. Mais non, c’était le règne absolu du "quoi qu’il en coûte" : on ferme le pays, on indemnise et on verra bien.
Qu’est-ce qui est différent cette fois-ci ?
Le camp de la prudence sanitaire a perdu du terrain, celui des économiques en a gagné. Tout ça ne s’est pas fait tout seul. En fait, depuis le début, l’acceptabilité de ce reconfinement par l’opinion publique est limite. Le sort des commerçants, des bars et des restos est populaire, le virus fait moins peur et l’approche des fêtes de Noël crée une forme d’exigence collective de la population. Les Français veulent pouvoir être en famille. Tout ça crée un contexte très différent de celui du printemps qu’Emmanuel Macron semble avoir admis. Cette fois, le chef de l’État pilote la sortie du confinement au plus près des mouvements d’humeur et des évolutions de la population. Quitte à donner l’impression d’une politique de "stop and go".
Et Jean Castex ? Il était entré affaibli dans cette séquence.
Oui et il a toujours à ses côtés une rude concurrence politique, avec des ministres très puissants qui jouent leur propre petite musique. Bruno Le Maire, par exemple, a habilement imposé son point de vue dans la gestion du dossier des commerces non-essentiels et a réussi à faire décaler le Black Friday. Autre poids lourd du gouvernement, Gérald Darmanin a lui aussi poussé ses pions pour défendre les positions de son ministère sur les questions de sécurité. Avec moins de succès, ce que Jean Castex n’a pas laissé passer. Le Premier ministre s’est invité dans le dossier de la célébration des messes (les rapports entre l’Église catholique et le ministre de l’Intérieur s’étaient inutilement durcis) et sur la loi dite de Sécurité globale, le même Darmanin a dû faire marche arrière. Voilà, on a deux postures radicalement différentes. Autant Édouard Philippe était peu flexible et en tirait sa force politique, autant Jean Castex semble à l’aise avec les accommodements politiques et s’en sert pour établir son autorité. Chêne ou roseau, rappelez-moi, lequel survit aux coups de vent ?