Valérie Pécresse en tête des intentions de vote : première alerte pour Emmanuel Macron

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Chaque matin, Nicolas Beytout analyse l'actualité politique et nous livre son opinion. Ce mercredi, il revient sur le sondage Elabe qui donne Valérie Pécresse en tête des intentions de vote au second tour face à Emmanuel Macron. Selon lui, c'est une première alerte pour le président sortant.

Un sondage (Elabe pour BFMTV) donne Valérie Pécresse vainqueur au second tour face à Emmanuel Macron. Et c’est un petit événement dans la campagne.

Alors, on va tout de suite commencer par les précautions d’usage. On sait tous à quel point il faut manier les sondages avec précaution, on se souvient tous de la déroute des sondeurs lors de mémorables soirées électorales. Et puis, on est très loin du moment de l’élection, et puis les Français n’ont pas vraiment la tête à ça, et puis tout peut arriver en quatre mois. Il n’empêche : jamais un sondage publié n’avait donné Emmanuel Macron perdant à l’élection présidentielle de 2022. C’est la première fois, et c’est forcément un tournant…

Sauf qu’il n’y a pour l’instant qu’un sondage montrant ce résultat.

C’est vrai, mais il confirme (en l’amplifiant) un phénomène que d’autres instituts (l’Ifop et Harris Interactive) ont aussi mesuré dans leurs panels depuis dimanche : c’est un fait, la victoire de Valérie Pécresse à la primaire de la droite a eu un véritable effet booster, avec des progressions de 7, 10, 11 points dans les intentions de vote.

Pour expliquer ça, il y a d’abord le fait que les sondeurs peuvent enfin soumettre un nom et un seul aux personnes interrogées sur le vote Républicain ; ça focalise les réponses qui pouvaient s’éparpiller jusque-là. J’ajoute que c’est une femme, qu’elle a été bien élue lors de la primaire et que les signaux d’unité envoyés par son camp peuvent avoir séduit le corps électoral qui avait voté Fillon il y a cinq ans.

Pour Valérie Pécresse, en tout cas, c’est une donnée politique qui tombe à pic. Rien de tel en effet pour rassembler son camp derrière sa candidature. La possibilité d’une victoire agit toujours comme un puissant coagulant ; ça calme les impatients à qui la candidate officielle des Républicains peut rappeler que c’est elle qui a les clefs d’une possible entrée à l’Elysée. Et puis, au-delà de sa famille d’origine, savoir qu’une personne peut battre Emmanuel Macron, dans ce pays tellement friand de dégagisme à chaque élection présidentielle, peut provoquer un réflexe de vote utile.

À l’inverse, ce sondage n’est pas une bonne nouvelle pour Emmanuel Macron.

Effectivement. L’effet produit sur son camp va être exactement inverse : doute sur la tactique, questionnement sur le choix d’une entrée en campagne très tardive, tiraillements sur le dispositif de campagne encore étrangement évanescent.

C’est un changement de climat dans la campagne. Et c’est un échec stratégique pour l’Elysée qui avait misé jusqu’ici sur un duel, un nouveau duel avec Marine Le Pen, une fois de plus facile à gagner. La montée d’Eric Zemmour n’inquiétait d’ailleurs pas plus que cela puisque son côté ultra-clivant le rendait encore plus facile à battre au second tour. Raté, une candidate de la droite républicaine est en train de chambouler ce scénario trop écrit, trop tôt.

Alors bien sûr, Emmanuel Macron va réagir : il a la main sur le calendrier, il peut gérer ses interventions politiques comme il l’entend, puisqu’il n’est toujours pas candidat, et il compte bien s’appuyer sur la présidence française de l’Europe (un costume qu’il va endosser le 1er janvier) pour montrer qu’il a, lui, une existence et un bilan à l’international.

Et puis, je le redis : prudence. Il n’y a pour l’instant qu’un sondage, et Valérie Pécresse, avec un capital de 20% des voix, ne ferait que reconstituer le stock d’électeurs que François Fillon avait réussi à sauver il y a cinq ans, contre vents et marées. Vous savez qu’on dit que, depuis des années, plus rien ne se passe comme prévu à chaque campagne présidentielle : je pense à l’irruption d’Emmanuel Macron en 2017, ou à l’éviction de la gauche par Jean-Marie Le Pen il y a 20 ans. Voilà en tout cas la première surprise de ce millésime 2022.