L’Europe enclenche le processus des grands emprunts qui soutiendront l’activité. Nicolas Barré fait le point sur une question d'actualité économique.
Le "quoi qu’il en coûte" version européenne arrive. L’Europe s’apprête à lancer de grands emprunts pour financer la relance post-covid.
C’est le jour J ! La Commission réunit ce mardi les grandes banques internationales pour lancer son premier grand emprunt. Clément Beaune, le secrétaire d’État chargé des Affaires européennes, nous l’annonce ce mardi matin : un premier emprunt d’environ 10 milliards sera lancé ce mois-ci. Et d’autres vont suivre. Une centaine de milliards d’euros d’ici la fin de l’année. C’est le début très concret de la mise en œuvre du plan de relance de 750 milliards d’euros décidé par les 27.
L’Europe aura mis dix mois à lancer ce plan.
C’est à la fois long et pas long. Dix mois, c’est évidemment long pour ce qui est censé être un plan répondant à une situation d’urgence. La preuve c’est que l’argent va arriver alors que nous sommes déjà sur la voie du rebond. Mais ce n’est pas si long quand on songe à deux choses. D’abord, il fallait l’accord des Parlements des 27 états membres et ce n’est jamais simple. Ensuite et surtout, il s’agit qu’on le veuille ou non d’un saut quantique pour l’Union européenne puisque pour la première fois de son histoire, au grand dam des Allemands et des Néerlandais qui se sont fait tordre le bras, l’Europe va devenir un petit peu française ou italienne. Elle va s’endetter, elle va émettre de la dette commune.
Comme un État ?
Exactement, c’est le point le plus symbolique et le plus sensible : une dette commune, ce n’est pas rien. Cela signifie que certains vont payer pour d’autres. Concrètement, une partie de l’argent de la relance qui ira par exemple à l’Italie sera remboursé par les Allemands. Il va y avoir des transferts de richesse. Comme à l‘intérieur d’un État. Quand le Trésor français emprunte pour financer une infrastructure en Corrèze, tous les Français remboursent. Avec ce mécanisme d’emprunt totalement nouveau, l’Europe crée en quelque sorte un début de Trésor européen commun. La crise du Covid aura eu cette conséquence de faire franchir un pas à l’intégration des Etats européens. Comme souvent en Europe, la politique avance dans les crises et par l’économie.