La menace ultralibérale brandie par Marine Le Pen en parlant d'Emmanuel Macron est absurde. Un fantôme destiné à faire peur, rien d’autre.
L'édito éco de Nicolas Barré, directeur de la rédaction des Echos. Bonjour Nicolas. La France va-t-elle devenir un pays ultra-libéral si Emmanuel Macron gagne la présidentielle ? C’est ce dont l’accuse Marine Le Pen et c’est ce que pensent beaucoup d’électeurs de Jean-Luc Mélenchon.
Il y a deux mots qui font peur, deux mots-épouvantails qui se sont faufilés dans notre débat public, deux mots qui à force d’être brandis sont devenus comme des vérités : ultralibéral et austérité. La France serait plongée dans l’austérité depuis des années et avec Macron (on disait la même chose de Fillon), elle deviendrait en plus, comble de malheur, ultralibérale. Or ce sont deux contre-vérités absolues.
Comment cela ?
L’austérité d’abord : quand un pays a des comptes publics déficitaires, c’est le contraire de l’austérité. Le déficit, c’est de l’argent public injecté dans l’économie. Or en France, cela fait depuis 1973 que nous sommes constamment en déficit. On pourrait dire que depuis 44 ans, nous ne souffrons pas d’austérité mais du contraire : c’est ce qui explique une dette faramineuse.
Autre légende : la France ultralibérale. Le moins qu’on puisse dire est que ça ne risque pas d’arriver. Nous sommes le pays qui incarne le contraire absolu. Ce qui nous distingue, c’est que nous sommes, de loin, le pays le moins libéral d’Europe. Les dépenses publiques absorbent 56% de la richesse nationale contre 47% en moyenne dans la zone euro. Il n’y a pas plus collectiviste que nous.
Mais le programme d’Emmanuel Macron est tout de même libéral
Il ne contient rien qui ressemble à de l’ultralibéralisme ou à des déréglementations massives. Même appliqué à la lettre, la France aura toujours dans 5 ans des dépenses publiques très au-dessus de la moyenne : Macron prévoit de revenir à 52-53%. L’Etat contrôlera toujours des centaines d’entreprises. La France sera toujours un pays hyper-réglementé car ça ne change pas en cinq ans. La menace ultralibérale brandie par Mme Le Pen est absurde. Un fantôme destiné à faire peur, rien d’autre.