Le Ministre du Redressement productif s'exprime sur l'actualité politique national, à commencer par l'éventuel remaniement ministériel.
Ses principales déclarations : A propos des rumeurs de remaniement "Je suis dans mes dossiers, dans mes problèmes... On a commencé un travail gigantesque : sauver l'aluminium, la pétrochimie, garder nos outils de travail, créer ce qu'on n'a pas... C'est un travail de titan !
Vous me prenez un peu au dépourvu !Je pense que nous devons revenir aux problèmes des Français, nous n'avons que ça à traiter, nous sommes même là pour ça ! Restons là-dessus. Si le Président de la République a des décisions à prendre, il lesprendra. Vous les découvrirez, et nous aussi !"
Jean-Marc Ayrault mérite de rester là où il est ? "Il fait l'essentiel de cette tâche difficile, il le fait courageusement !" Merkel est à l'Elysée. Avec votre homologue allemand, quels projets communs pouvez-vous avoir pour l'industrie et l'énergie ? "Le Président avait parlé de l'Airbus franco-allemand de l'énergie, nous avons travaillé avec nos collègues allemands et mon homologue à imaginer quelles industries nous pourrions développer ensemble. Nous avons un projet sur le stockage de l'énergie, sur l'hydrogène qui est un sujet qui intéresse nos constructeurs automobiles, et la question du photovoltaïque décimé par le dumping chinois, sur lequel nous imaginons une nouvelle génération et d'industries." Et peut-être un jour le gaz de schiste ? "Ah, ça..." Il paraît que le Président de la République a un peu évolué sur la recherche et l'exploration après ses discussions avec Barack Obama... "
Je crois que la question de la recherche est toujours posée ! Les Français aiment l'avenir, croient dans l'innovation. Le problème du gaz de schiste, et c'est démontré aux USA, c'est qu'il est d'une pollution terrible, donc il faut régler le problème de la pollution ! Si on règle ce problème, y compris par la technologie, on peut rouvrir le débat !"
Pourquoi vous intéressez-vous tant aux mines ? On parle de la création d'un office sur les mines... "La France a disparu dans le domaine minier, laissant la place à des majors internationales et beaucoup d'Etats, y compris en Afrique et en Asie, demandent le retour de la France.
Nous sommes en train de travailler sur une compagnie nationale des mines qui nous permettra d'exploiter nos propres ressources naturelles, respectueusement de l'environnement, aussi de la déontologie et de l'éthique notamment dans les pays africains. Cela nous permettra de sécuriser nos approvisionnements, de maitriser les prix. Bref, c'est le retour de l'Etat dans la résistance économique, dans la planification industrielle : bref, c'est le retour de Colbert !"
Une nouvelle aventure commence pour Peugeot, l'Etat rentre dans le capital, 14%, près d'un milliard d'euros. Où avez-vous trouvé ce milliard ? "Nous avons 70 milliards de participations dans 71 entreprises ! Donc nous avons décidé de céder quelques pourcentages homéopathiques, de les vendre, notamment dans Safran, pour pouvoir investir dans Peugeot. Mais l'événement majeur, c'est une intervention massive de l'Etat dans le capital de Peugeot ! 800 millions !" C'est un investissement à risques, vaut-il le coup ? "Nous avons des centaines de milliers de salariés de PSA ! Nous avons le 1er constructeur français qui s'est isolé, qui n'a pas su passer des alliances industrielles au plan mondial, qui a une taille trop étroite, qui a besoin de trouver une alliance et qui a besoin de capitaux car c'est une entreprise qui a perdu beaucoup d'argent. Donc c'est une intervention massive dans le capital, c'est un acte majeur de politique industrielle !
Aujourd'hui, tous les Français deviennent copropriétaires de PSA, de Peugeot, de Citroen, ça va être leur bien en quelque sorte ! Si l'Etat n'était pas intervenu, nous aurions été en de graves difficultés, PSA serait peut-être passé sous un contrôle que nous n'aurions pas maîtrisé."
L'accord ressemble à une nationalisation rampante et temporaire ? "C'est un investissement de tous les Français dans un outil industriel fondamental : le premier constructeur automobile français." L'Etat sera pilote ou passager ? "Il sera co-pilote !" L'Etat restera-t-il dix ans ou pourra-t-il sortir de l'opération avant ? "L'accord conclut que les augmentations de participation ne sont pas possibles, mais il est possible de sortir. Mais notre choix est de rester, de défendre la recherche-développement pour qu'elle se maintienne en France, 75% c'est le contenu de l'accord, les sites industriels vont être chargés, nous allons augmenter la production en France." On ne réduit pas les sites en France... "Exactement ! C'est un engagement qui est pris : je veux rassurer les salariés, les élus des territoires. PSA produit 930.000 véhicules en France, nous avons le souhait de monter à 1 million, c'est l'engagement pris auprès des syndicats !" Engagement même avec les Chinois à maintenir, développer des sites et des emplois en France d'abord... "Exactement ! Pourquoi ? Parce que les Chinois ne s'intéressent pas au marché européen mais au marché asiatique ! C'est là que PSA va gagner des parts de marché. En clair : gagner de l'argent en Chine, premier marché mondial, croissance considérable, +30% par an, pour pouvoir financer la recherche-développement, l'innovation, la montée en gamme de PSA en France et en Europe." Une quatrième usine en Chine... "Ca fait 30 ans que PSA est en Chine : pour vendre des voitures en Chine, il faut les produire en Chine sinon vous n'avez pas le droit." Qu'est-ce qui empêchera Dongfeng de prendre les rênes de PSA ? "Les participations ne doivent pas bouger, c'est l'accord." Les Peugeot avaient-ils le choix ? Pouvaient-ils refuser ? "Je crois que certains dans la famille Peugeot ont compris la nécessité de s'internationaliser ! Quand vous avez un constructeur comme Toyota, premier constructeur mondial, 8 millions de véhicules par an, que Renault-Nissan n'est plus très loin et a une taille mondiale... Quand vous ne produisez que 3 millions de véhicules, vous n'avez pas la bonne taille pour affronter la mondialisation donc c'est un renforcement de la base industrielle France face à la mondialisation." Conseil de surveillance : 14 personnes. 6 pour les actionnaires, 6 extérieurs, deux représentants des salariés, et le Président. Ce sera un Peugeot ? "Nous n'avons pas décidé. La question se posera après l'assemblée générale." Quel est l'avis de Colbert ? "Colbert a des idées mais il garde le silence ! Vous savez ce que disait Euripide : si tu as des choses plus fortes que le silence à dire, dis-les sinon garde le silence. Je garde le silence ! Il y aura une discussion entre les actionnaires." Un indépendant que l'Etat ne désignera pas ? "C'est encore trop tôt pour le dire." Carlos Tavares prend aujourd'hui la direction de la branche auto de PSA. Fin mars, il prend le volant du groupe. C'est bien lui qui va diriger PSA ?
"La réponse est oui ! Vous me permettrez de dire ma confiance dans Carlos Tavares, c'est un homme que je connais, qui a été numéro 2 de Renault. Je connais les qualités, l'engagement, l'implication, la vision. Je voudrais aussi rendre hommage à M. Varin qui a réussi cet accord. C'est un point important : malgré toutes les difficultés qu'il a eu à connaître, parfois nous avons eu des mots, mais je veux lui rendre cet hommage car cet accord organise sur le plan du patriotisme industriel la pérennité et la solidité de PSA dans l'avenir."
Selon le Canard Enchainé, lundi, avant l'arrivée de François Hollande à l'Elysée, vous auriez dit devant les patrons : "En France, trop de rigidité, code du travail, 35 heures, seuils, il faut soutenir les entreprises en débloquant tout ça..." Vous confirmez ? "Je ne confirme pas du tout ! Je ne sais pas comment le Canard Enchainé invente des choses... Il faut faire attention aux ragots ! Et surtout à la malveillance ! Ce sont des propos que je n'ai jamais tenus, je ne les ai même pas pensés : je pense qu'on a un certain nombre de problèmes en France mais qui ne sont pas de cet ordre-là. J'invite les journalistes à vérifier leurs informations..." La réalité et les voyages ont transformé le démondialisateur Arnaud Montebourg en un acteur déterminé de l'ouverture au monde ? "Je ne suis pas pour la fermeture au monde ! Je dois vous dire que la démondialisation en acte dans mon ministère, c'est la défense, l'organisation méthodique de l'industrie du made in France, c'est la même chose ! C'est rapprocher les lieux de production des lieux de consommation ! Quand on produit en France pour satisfaire le marché européen, on satisfait à la fois le démondialisateur et l'amoureux du made in France !"