Selon Jean-Christophe Cambadélis, la victoire frontiste de Brignoles fait entrer la vie politique dans un régime tripartiste.
Jean-Christophe Cambadélis, député PS de la 20ème circonscription de Paris
Ses principales déclarations :
En langage de gauche, comment traduisez-vous Brignoles ?
"Une défaite de la gauche, une victoire du FN... Un coup de semonce, une victoire qu'il faut mesurer et relativiser. Tous les partis institutionnels et républicains [ont reçu la fessée]."
"500 voix de plus que d'habitude, ce qui montre la dynamique frontiste en ce moment. Mais ce qui est intéressant, ce n'est pas tellement la victoire électorale mais que le FN se soit mis au centre de la vie politique française et qu'il sera l'enjeu des prochaines élections. Le tripartisme est en marche entre le FN, la gauche avec le PS principalement et l'UMP."
"Le FN est un parti légal mais pas un parti républicain. Le fond de son idéologie, c'est le développement de l'apartheid, cela pose un problème du point de vue de la républicain. Pour devenir un parti dans la République, il doit abandonner la préférence nationale, qui fait pour lui qu'il y a des Français de souche et des Français de papier."
Le front républicain est mort ?
"Il est boitillant ! Pour un front républicain, il faut être deux ! Seul le PS le porte, l'UMP le refuse. Quand une candidate fait campagne en disant que le candidat du FN n'est pas valable car pas du canton, on voit que le niveau de la bataille n'est pas excellent..."
Qu'est-ce que Brignoles annonce pour les municipales ?
"Un abstentionnisme fort au premier tour et démobilisation possible au second, la présence du FN dans les conseils municipaux dans quelques villes, quelques villes gagnées et une tension sociale. Le FN, vous avez vous vu les discours développés au soir de leur victoire, et les clameurs... "On est chez nous" disait-on à Brignoles... Ca veut dire que pour eux, tout ce qui n'est pas de souche est à combattre..."
La primaire PS de Marseille offre une image déplorable de votre parti... M.-A. Carlotti pulvérisée...
"Ca c'est le scrutin ! Les électeurs de gauche ont choisi de mettre en avant deux dirigeants issus des quartiers Nord, ce qui n'est pas sans signification."
Mme Carlotti proteste contre le clientélisme, des échanges d'argent, les mini-bus...
"Oui, j'ai préféré sa deuxième déclaration après quelques coups de téléphone je crois, que sa première. La première était amertume, la seconde un retour à la raison."
M.Mennucci est le candidat choisi par Elysée et Matignon contre Samia Ghali. Il est cuit ?
"(Rires.) Non ! Je ne dirais pas ça ! D'abord nous n'en savons rien, nous étions pas présents lors des coups de téléphone. Je crois que l'idée était de ne pas donner une mauvaise image d'une primaire qui s'est plutôt bien passée, alors que d'autres à Paris autour de Mme NKM se sont plutôt mal passées..."
Quelle est votre préférence pour Marseille ?
"Je n'en ai pas. J'étais pour qu'un des deux soit au second tour, je pensais qu'il fallait que cette France que représentent Ghali et Mennucci soit représentée dans cette élection..."
Vous n'irez pas, ni vous ni dirigeants du PS, à Marseille faire campagne au côté de l'un ou l'autre ?
"Non, c'est aux marseillais de se décider, ils vont le faire."
Guérini voudrait la victoire de Jean-Claude Gaudin... Il encouragerait Samia Ghali qui en mars sera moins difficile à battre...
"On dit beaucoup de choses, on prête beaucoup de choses à M. Guérini. Je ne sais pas ce qu'il souhaite, pas sûr qu'il souhaitait ces deux candidats, il avait peut-être envie qu'un troisième soit là..."
Le FN est prévu à 22-25%, les trois partis vont s'affronter...
"Oui, c'est Marseille ville ouverte. Je pense que rien n'est sûr à Marseille. Les calculs visant à dire que tel candidate serait plus facile à battre que tel autre. Il y aura une triangulaire."
La France n'est-elle pas divisée en deux ?
"Il y a deux France ! Une qui est refermée sur elle-même, qui a peur, qui voit dans l'étranger les raisons de ses difficultés, et une France totalement ouverte sur la mondialisation, peut-être même cosmopolite. La difficulté : rassurer l'une, ne pas décevoir la seconde. Leurs aspirations sont extrêmement antagonistes. Je crois que le Président peut les réconcilier, les rapprocher, c'est son rôle. Les partis politiques, aussi, devraient être en capacité de donner une issue positive à ce débat majeur."
Ce n'est pas fait jusqu'à présent...
"Pas suffisamment. On ne dit pas assez que la France se redresse petit à petit : chômage, croissance, commerce extérieur. Et puis je trouve qu'on est vraiment très frileux par rapport à Marine Le Pen... C'est une fausse valeur. Elle est contre l'Europe mais touche chaque mois depuis 10 ans son chèque de l'Europe, 11.000 euros. Elle dit qu'elle va redresser la France : toutes les villes dirigées par le FN ont laissé des dettes considérables. Elle dit s'intéresser de tout près aux plus démunis mais elle est une fille à papa comme disait son père. C'est une fausse valeur qui conduirait la France dans la ruine et l'échec."
Vous sortez de l'enfermement dans le déni et attaquez directement ?
"Je tire conséquence de mon analyse : c'est le tripartisme, c'est un parti qui n'est pas comme les autres mais se présente comme les autres. Nous allons l'affronter."