La FNSEA préférerait que le gouvernement adopte un système de vignette pour les camions étrangers qui traversent la France.
Ce matin à 8h20, Europe 1 recevait Xavier Beulin, président de la FNSEA.
Ses principales déclarations :
Vous avez été reçu hier par le Premier ministre... Il n'était pas seul...
"Non, quatre ministres l'accompagnaient, deux directeurs de ministre... Donc 1/3 du gouvernement ! Ça ne se fait pas toujours comme ça : je pense que c'est une marque d'attention, mais aussi sans doute la volonté du Premier ministre d'être dans le pragmatisme, à l'écoute, mais avec l'intention sans doute d'apporter des réponses concrètes sur des sujets très nombreux, le pacte de responsabilité bien sûr mais bien d'autres également"
Il écoute : il procrastine ou il tranche ?
"Ce qu'on espère, c'est qu'il tranche ! Je lui ai dit que nous avions des attentes extrêmement rapides à obtenir : d'abord parce que l'économie a besoin d'un nouveau souffle, il faut remettre la machine agricole et économique en marche avant. Dans les grandes ou petites entreprises, il y a besoin de redonner des perspectives : dans la filière agricole, on a une chance inouïe, la demande mondiale est extrêmement soutenue, +2 à +3% chaque année, ça devrait être bon pour l'agriculture française, il faut en capter une partie et satisfaire nos propres besoins."
Les agriculteurs se plaignent que le pacte de responsabilité allège les charges des PME. Et vous dites : "Et nous ?"
"Oui, d'une part car sur les bas salaires de l'agriculture il y avait un certain nombre d'exonérations : il faut donner un coup de pouce supplémentaire. Il y a le cas des agriculteurs, artisans, commerçants qui n'étaient pas concernés par le CICE. Il nous propose de prendre 3% de charges sociales à partir de 2015 : pour chaque agriculteur, il y aura 3% de charges en moins. On a fait une estimation sur une année : entre les agriculteurs, chefs d'exploitation et leurs salariés, c'est à peu près 700 millions d'euros qui devraient être obtenus."
Combien d'emplois et de fermes sauvés de cette manière ?
"On a aujourd'hui près de 9.000 emplois non pourvus dans l'agriculture : 9.000 emplois c'est l'engagement déjà pris avec le Président de la République à l'automne dernier."
L'écotaxe : vous étiez contre dès le début. Après votre entretien avec Manuel Valls, le système précédent est mort et enterré ?
"Je reprends les propos du Premier ministre : il faut remettre le dispositif à plat. Je considère que l'ancienne version est morte. C'est ce que j'ai dit au Premier ministre. J'ai pris un exemple : filière avicole, l'œuf, le poussin, l'aliment du poussin, le ramassage du poulet, le passage à l'abattoir, la transformation et la livraison en grande distribution, 6 fois le prélèvement d'écotaxe pour un même produit ce n'est pas tenable. Il faut rebâtir le dispositif."
Valls et Le Foll vous ont confirmé qu'une fois pour toutes c'est fini, ils repartent à zéro...
"Il faudra voir dans les propositions de Mme Royal laquelle est retenue : une qui nous va bien, c'est le système de vignettes sur les camions étrangers qui traversent la France. C'est une mesure qu'il faut regarder..."
Il parait que ça ne marche pas au niveau européen...
"Il faut regarder tout ça, il y a peut-être des négociations avec Bruxelles..."
Vous dites qu'il faut financer les infrastructures...
"Oui, chacun est conscient de la responsabilité qu'il a par rapport aux transports. Pour autant, peut-on taxer des produits made in France où chacun revendique cette origine par rapport à des produits étrangers ? Voilà la question posée."
Les Verts ont quitté le gouvernement. Ressentez-vous les conséquences de leur départ ?
"Il faudra le mesurer dans le temps. Mais je note que nous avions besoin d'un gouvernement ramassé pour prendre des décisions, de bonnes décisions : j'espère que ce gouvernement ramassé aura la sagesse d'avancer au bon rythme. Ce que nous avons dit hier au Premier ministre, ce sont des choses simples : comment faire en sorte que, par rapport à ce pacte de responsabilité, on puisse très vite l'enclencher et surtout, c'est la difficulté aujourd'hui dans notre pays, redonner des perspectives à moyen et long terme ? Petite ou grande entreprise, on a besoin de perspective à moyen et long terme. Le politique, lui, est souvent dans une vision plus court-termiste."
Vous avez rencontré Ségolène Royal ?
"Avec Philippe Martin, son prédécesseur, nous avions entamé un dialogue en toute confiance, toute transparence. Je souhaite que ça continue : nous avons des propositions très intéressantes à faire, avec encore une fois recherche, innovation, connaissance. On peut combiner écologie et économie aujourd'hui, il n'y a pas d'incompatibilité."
Manuel Valls et Stéphane Le Foll avaient entendu le cri des paysans qui se plaignaient de vols... Ces vols ont vraiment augmenté ?
"Considérablement ! Ce qui est nouveau, c'est la nature des vols : on vole des animaux, on les tue dans les champs, on les dépèce sur place, c'est nouveau. On vole des engins, jamais on n'a vu ça. C'est plus le vol de 20L de fioul sous le hangar : ce sont des filières organisées."
Elles ont été identifiées...
"Oui... Je vais être prudent sur mes propos... Elles sont souvent malheureusement originaires de pays de l'Est... Je ne veux pas cibler tel ou tel pays. Vous savez le débat qu'on a sur un certain nombre de pays, je ne veux pas en rajouter. Il faut démanteler ces filières : c'est un travail très important conduit avec les polices et gendarmeries de ces pays. Il y a encore du progrès à faire : chaque jour, des dizaines de vols sont constatés. Quand on regarde la carte sur 12 ou 18 mois, les zones se déplacent ! On voit bien que ce sont des filières très organisées : elles convoitent un territoire et se déplacent de quelques centaines de kilomètres."
Cazeneuve prend le relais de Manuel Valls...
"Oui, il a demandé qu'on organise un déplacement sur le terrain : je vais le lui organiser. Il doit se rendre compte de la gravité de la situation."
La FNSEA s'engage dans les européennes ?
"Oui, avec un grand débat le 14 mai, organisé avec les Chambres d'agriculture : un grand débat avec la plupart des partis."
Y compris le FN ?
"Oui, car nous sommes préoccupés par un certain nombre de thèses aujourd'hui. Il y a un repli sur soi notoire, y compris dans la profession agricole. Bien sûr l'Europe nous créé beaucoup de tracasseries, de difficultés, mais fondamentalement les agriculteurs sont européens aujourd'hui. Et nous restons européens."
Le FN gagne chez qui ? Les petits agriculteurs ?
"Pas forcément ! Ce sont les tracasseries de tous les jours ! Il y a une telle facilité à mettre Bruxelles en cause, à en faire le bouc-émissaire. Il faut de temps en temps qu'on sache balayer devant notre porte : des situations sont générées par de mauvaises décisions prises dans notre pays depuis un certain nombre d'années. Ne renvoyons pas à Bruxelles toute la responsabilité. En revanche, prenons toute notre place dans le débat européen et surtout dans les instances européennes."
A propos de l'amendement Glavany. Pourquoi avez-vous écrit au Président ?
"Le Président a fait une déclaration, il l'a écrit dans un article en début d'année : il a considéré que le débat était clos, que le code rural était parfaitement documenté pour répondre à toutes ces difficultés, en particulier la reconnaissance de la sensibilité de l'animal. C'est déjà reconnu dans le code rural."
Vous ne pouvez pas reconnaître la valeur affective de l'animal ?
"Mais bien sûr ! Mais ne mélangeons pas l'animal domestique et l'animal d'élevage ! Les éleveurs aujourd'hui ne comprennent pas qu'on remette ce dossier-là sur la table alors que le Président a estimé que c'était entrer dans une nouvelle polémique inutile."
Que vous ont dit Valls et Le Foll ?
"Je les ai trouvés surpris pour le moins d'un tel amendement arrivé comme ça, en pleine nuit, au travers d'une loi où rien n'avait été préparé. On ne touche pas au code civil comme ça. Retiendront-ils cet amendement ? Nous verrons bien en 2ème lecture."
Bruxelles ne va pas vous imposer le truc ?
"Non, nous ne sommes pas dans ce domaine d'une compétence bruxelloise."