Cécile Allegra, journaliste et auteur de "Le salaire des enfants", a enquêté sur le travail des enfants dans plusieurs pays européens, de la Bulgarie à l'Angleterre en passant par la France.
Alors qu'elle termine un reportage sur la mafia, assise à une terrasse de café, Cécile Allegra voit arriver "un gamin de 11-12 ans, qui servait des plateaux de café aux tables". "Je n'avais jamais vu ça", explique-t-elle sur Europe 1. "Très rapidement, en enquêtant, j'ai compris que c'était beaucoup plus diffus que ce qu'on pensait. Des enfants étaient au travail sur les marchés, dans les arrière-boutiques des cordonniers, beaucoup dans les métiers de bouche, jusqu'à des métiers absolument insoupçonnables". Commence alors son enquête, qu'elle publie aujourd'hui dans un livre, Le salaire des enfants.
"Le contrecoup de la crise". "L'Italie est un révélateur", explique-t-elle. "Comme c'est un pays qui a une forte partie de travail au noir, cela ressort de façon plus forte. Le contrecoup de la crise se fait sentir. Mais c'est aussi parce que l'école est en train de devenir de plus en plus faible. Ce sont des marqueurs qui se retrouvent dans d'autres pays : une déscolarisation ou une non-valorisation de l'école".
"C'est toujours un des deux parents qui perd son travail". Souvent, le même scénario est observé. "C'est toujours un des deux parents qui perd son travail, et on envoie l'enfant faire des petits boulots. Et petit à petit, ce travail devient permanent", précise-t-elle.
En France aussi. Et la France n'est pas épargnée par ce phénomène. "Cela resurgit avec l'intention française de valoriser l'apprentissage, de le favoriser un peu plus tôt, à partir de 13 ans. Le problème, c'est qu'il y a trop peu de gardes-fous. Du coup, ces gamins vont souvent remplacer une femme de ménage, et notamment dans les métiers de la cuisine". Et de citer le cas du jeune Jordan, qui en 2010, trouvait la mort en tombant dans le pétrin d’une boulangerie où il effectuait un stage. "En France, l'apprentissage se transforme un peu en permis d'exploiter", regrette-t-elle.