François de Rugy affirme que les plus riches ne sont pas si bien lotis, qu'il y a eu 11 milliards de baisse de la taxe d’habitation, contre trois milliards pour l’ISF.
Vrai-Faux : les syndicats unis contre le "Président des Riches".
Vous verrez le slogan inscrit sur les banderoles aujourd’hui, et cet épouvantail embarrasse le président Macron. C'est une caricature, dénonce le président de l’Assemblée nationale François de Rugy, qui soutient, chiffres à l’appui, que la politique du gouvernement profite à tout le monde.
"Quand vous baissez la taxe d’habitation de 11 milliards, je le mets en comparaison avec la baisse de l’ISF puisque c'est ça, la fameuse mesure quand tout le monde dit que c'est le PR des riches. C'est 3,5 milliards d'euros de baisse de l’ISF, 11 milliards sur la taxe d'habitation".
Les plus riches ne sont pas mieux lotis que les autres. Vrai ou faux ?
C’est faux. Et la comparaison est vraiment maladroite, parce que l’enveloppe de la taxe d'habitation, 17 millions de ménages vont se la partager, contre 300.000 pour celle de l'ISF. Le gain moyen ne sera évidemment pas le même. C’est un choix politique, pour relancer l'économie et faire baisser le chômage. Mais un choix qui reste, visiblement, difficile à assumer.
Car oui, les mesures votées pour 2018 vont profiter aux plus riches. L’ISF sera transformé en impôt sur la fortune immobilière (100.000 contribuables seulement devraient continuer à le payer, contre 350.000 aujourd’hui), et la flat taxe sur les revenus du capital profitera à une minorité, difficile à chiffrer car Bercy n’a pas de données fiables sur les patrimoines. On sait quand même que l’impôt qu’acquittaient ces 350 000 contribuables très aisés va baisser de 3,2 milliards en 2018, auxquels il faut ajouter les 1,3 milliards de pertes due à la flat taxe : en tout, 4 milliards et demi seront rendus, l'an prochain, aux Français les plus riches.
Le gain moyen atteint 12.000 euros, quand les autres, ceux qui vont voir baisser leur taxe d’habitation, auront beaucoup moins : 166 euros en moyenne en 2018, selon les calculs de la Commission des Finances du Sénat, donc 72 fois moins.
Évidemment, cette comparaison est elle aussi grossière, car l'impôt sur la fortune n’est pas un impôt juste. Il frappe lourdement les petites fortunes, qui paient déjà un maximum d’impôt sur le revenu. Toutes ne seront pas gagnantes, d’ailleurs, avec la réforme, puisque leurs biens immobiliers vont concentrer désormais l’essentiel de l'impôt. Les vraies gagnants restent les très grandes fortunes, de plusieurs millions d’euros, dont les actifs se répartissent davantage en action.
Mais la baisse de la taxe d’habitation, elle, va profiter à tout le monde ?
Non, justement. Cette taxe d’habitation aujourd’hui, les plus modestes ne la paient pas : cinq millions de foyers, en 2017, sont exonérés ou ont, par un jeu d’abattements, une taxe nulle. Pour eux la réforme ne change rien. Et 7,5 millions de foyers paient un montant plafonné. Aujourd’hui, en réalité, moins de 16 millions de foyers acquittent la taxe d’habitation à taux plein. En 2018, ils ne seront qu’en partie exonérés, puisque la réforme s’étale sur trois ans, pour un coût de trois milliards d’euros. Les 11 milliards dont parle Monsieur de Rugy ne viendront qu'en 2020, quand la réforme sera totalement appliquée. Cette année-là, le gain moyen sera de 554 euros par foyer, avec des disparités, car on ne paie pas la même taxe selon la commune où l'on réside, la qualité du bien. Les ménages les plus modestes (ceux des 1er, deuxième décile de niveau de vie), ne vont pas gagner grand-chose, et comme ils vont subir, aussi, la hausse de la CSG, de la fiscalité indirecte, la baisse des aides au logement. Il n’est pas certain qu’ils s’y retrouvent. C’est cette inquiétude que vous entendrez aujourd’hui dans la rue.