Le gérant d'un salon de coiffure condamné pour "traite d'êtres humains"

  • Copié

Chaque matin, Roland Pérez évoque une question de droit en rapport avec l'actualité dans Europe 1 Bonjour.

Roland Pérez revient ce vendredi sur une affaire qui a connue divers épisodes judiciaire dont le dernier date de ce jeudi après-midi, où le gérant d’un salon de coiffure a été condamné pour "pour traite d’êtres humains".

On croyait ce délit éradiqué en France, et bien non, en preuve cette affaire qui dure depuis 2014 et qui a connu de multiples rebondissements avec pour épilogue une condamnation de l’employeur à un an de prison ferme mais pas uniquement.

Le jugement est tombé ce jeudi après-midi pour les plaignants, tous employés d’un salon de coiffure afro situé dans le 10e arrondissement de Paris dont le gérant était poursuivi pour "traite des êtres humains". Quelle est la genèse de cette affaire et le jugement rendu par le tribunal correctionnel de Paris ?

Tout commence en Mai 2014 où les coiffeurs et manucures du salon de coiffure décident de se mettent en grève. Dans un premier temps pour obtenir le paiement de leurs salaires et la régularisation de leurs situations administratives. Ils vont même pendant plusieurs mois occuper le salon, amenant l’employeur à déposer le bilan. Dans un second temps, aidés en cela par la CGT, ils vont déposer plainte pour "traite des êtres humains", "travail dissimulé" et "faillite frauduleuse".

L’épilogue s’est noué ce jeudi après-midi avec une condamnation du gérant à deux ans de prison dont un an ferme, une interdiction définitive de gérer un établissement et même de paraitre dans le 10e arrondissement où le salon était exploité (ce qui est assez rare pour être souligné), ainsi que 25.000 euros d’amende outre des dommages intérêts pour chacun des ex salariés.

Quelle est la définition de ce délit de "traite d’êtres humains" ?

C’est un délit à dimension évidemment internationale et qui désigne le recours, avec contrainte physique ou morale de personnes particulièrement vulnérables, aboutissant à une véritable exploitation de ces personnes. Ici, il s’agissait d’une exploitation par le travail de salariés dépourvus de titres de séjours réguliers et donc non déclarés et le plus souvent payés au lance pierre, ce qui avait conduit la CGT a accompagner tous ces salariés pour faire valoir leurs droits.

En matière de conflit du travail, ce n’est pas le conseil de prud’hommes qui est compétent ?

En fait, cette affaire avait plusieurs volets. Un volet civil et donc prudhommal qui a conduit l’employeur à être condamné aux prud’hommes mais, étant en faillite, c‘est l’assurance garantie des salaires qui intervenue et donc l’état qui a payer en partie les condamnations. Pour les conditions de recrutements et d’emplois, c’est le tribunal correctionnel qui est compétent.

Comment ces salariés ont-ils été recrutés ?

Pour la plupart, ils sont arrivés clandestinement en France. Du coup, pour survivre, il leur fallait travailler et le gérant du salon en a donc visiblement profité pour les contraindre à accepter des conditions de travail illégales, les rémunérant au compte-gouttes. D’ailleurs, l’inspectrice du travail auditionnée devant les juges a indiqué ne jamais avoir vu autant d’infractions commises par un même employeur qui avait déjà été condamné dans le passé.

Côté papiers ces salariés-victimes, ont-ils pu être régularisés ?

C’est la meilleure nouvelle de cette affaire, il y a plus d’un an, ils ont obtenu pour 14 d’entre eux un titre de séjour. Et comme le rappelle la CGT, le droit de travailler pour les demandeurs d’asiles restent souvent la seule alternative pour lutter efficacement contre la traite d’êtres humains et le travail dissimulé.

Les chroniques des jours précédents