Chaque matin, Roland Pérez évoque une question de droit en rapport avec l'actualité dans Europe 1 Bonjour.
Signes religieux distinctifs : comment doivent réagir les employeurs ? La cour de cassation vient de répondre.
Elle répond qu’une entreprise peut interdire le port de signes religieux. Mais comment et dans quels cas ?
Le 22 décembre dernier, la Cour de Cassation a rendu un arrêt confirmant qu’une entreprise pouvait interdire le port de signes religieux à ses salariés. Quelle était l’affaire qui lui était soumise ?
Au sein d’une entreprise informatique, une salariée ingénieure avait refuser d’oter son voile alors qu’elle était en contact avec la clientèle sans que personne ne s’en plaigne pendant les premiers mois de son embauche. Sauf un client qui avait alors refusé de travailler avec elle, de ce fait l’employeur l’avait licenciée. La Cour d’appel avait validé le licenciement et la salarié avait saisi la cour de cassation de cette question cruciale intéressant bon nombre de travailleurs ne souhaitant pas se débarrasser de signes religieux distinctifs pendant l’accomplissement de leur travail, estimant que cela ne gène pas la qualité de leur travail ni ne heurte personne clients ou collègues.
La haute juridiction a-t-elle assorti cette interdiction de conditions ?
Exactement, car la justice n’est pas à l’aise avec ces questions de religion qui s’invitent régulierement au tribunal et qui font l’objet de décisions de la Cour de justice européenne reprises. D’ailleurs dans cette décision claire de la Cour de cassation, il est prévu que pour encadrer ces interdictions de signes religieux que:
Une règle écrite de neutralité figure dans le règlement intérieur de l’entreprise.
Seconde précision : la prohibition de signes religieux se doit d’être générale. Le voile islamique ne pouvant être le seul visé. Enfin, ces dispositions ne s’appliquent qu’aux salariés travaillant au contact du public.
Plus possible pour les salariés d’invoquer une discrimination ?
Non car selon deux arrêts de la Cour de justice européenne (CJUE), rendus le 14 mars dernier, "l’interdiction de porter un foulard islamique, qui découle d’une règle interne d’une entreprise privée interdisant le port visible de tout signe politique, philosophique ou religieux sur le lieu de travail, ne constitue pas une discrimination directe fondée sur la religion ou sur les convictions".
Au final, dans l’affaire soumise à la Cour de cassation, la salariée avait pourtant réussi a faire juger son licenciement abusif ?
Oui car La Cour a estimé que d’une part, le règlement intérieur de l'employeur n’exigeait en rien la neutralité de ses salariés. D’autre part, que cette interdiction ne visait qu’un seul signe religieux, en l’espèce le voile islamique, alors que l’impératif de neutralité doit s’imposer de façon générale à l’ensemble des salariés et toute confession confondue.
L’employeur pouvait-il aussi lui proposer un autre poste sans contact avec la clientèle ?
Oui c’est d’ailleurs ce que préconisait la cour de cassation.