Bordeaux - Toulouse : les contradictions à grande vitesse des écolos

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400 personnes ont manifesté ce week-end en Gironde contre la ligne à grande vitesse Bordeaux-Toulouse. Le chantier devrait démarrer en fin d'année, pour une mise en service en 2032. Pour les opposants, c'est un projet inutile.

 

Ce grand projet du sud-ouest, GPSO de son petit nom, est ancien puisqu'il date des années quatre-vingt-dix. Mais il a été relancé ces dernières années à la faveur de la nécessité de décarbonation du transport, 20% de nos émissions de gaz à effet de serre. Le TGV est un moyen de se déplacer vite, loin et en émettant aucun carbone, grâce à l'électricité issue du nucléaire.

Il y a dans ce projet un grand intérêt pour l'aménagement du territoire. Cette ligne permettrait de relier Toulouse à Paris en 3h10 et Toulouse à Bordeaux en à peine plus d'une heure. Pour l'instant, Paris Toulouse c'est au mieux 4h30, et en moyenne plutôt 5h25 de trajet en train selon la SNCF. On y va en TGV, mais toute une partie du trajet ne se fait pas à grande vitesse, mais à vitesse normale parce que la voie n'est pas adaptée.

Ça n'empêche pas les opposants d'expliquer que c'est un projet inutile. Des opposants écologistes à l'instar des instances d'EELV et du maire de Bordeaux Pierre Hurmic, qui est contre le prolongement de la ligne à grande vitesse depuis sa ville de Bordeaux jusqu'à Toulouse. Sympa le voisin.

Les opposants veulent défendre la vallée du Ciron, en mettant opportunément en avant des arguments liés à l'eau, et puis ils dénoncent l'artificialisation de 5 000 hectares. Pour eux, le chantier, qui devrait coûter dans les 14 milliards d'euros, est pharaonique et donc inutile.

On peine à comprendre la logique de l'opposition.

D'abord, offrir aux habitants du grand sud-ouest une façon d'aller de Bordeaux à Toulouse à grande vitesse, c'est-à-dire sans utiliser la voiture et en arrivant directement au centre-ville, ça paraît être une bonne nouvelle tant pour les émissions de gaz à effet de serre que pour la congestion des centres-villes.

Ensuite, et c'est un argument que fait valoir le président de la région nouvelle Aquitaine Alain Rousset, la construction de cette ligne à grande vitesse permet de dégager la voie classique et de faire de la place pour le fret ferroviaire. 10 000 camions remontent depuis l'Espagne et traversent la région chaque jour. Les marchandises, ce serait mieux sur les rails. On voit difficilement comment on peut être contre.

Et puis l'opposition des écologistes a cette ligne à grande vitesse entre en collision avec un autre de leur combat : celui de la suppression les vols intérieurs.

Paris Toulouse par le rail en 3h10 plutôt qu'en 5h30, ça change totalement la donne quand on doit choisir un moyen de transport. 3h10 de centre-ville à centre-ville, ça annule quasiment tout intérêt à prendre la navette aérienne pour un vol d'une heure, qui conduit loin du centre. Et d'autant plus quand le facteur carbone fait la différence. C'est d'autant plus évident que c'est exactement ce qui s'est passé pour la liaison Bordeaux-Paris : le TGV a tué l'avion. Un rêve écolo.

On peine vraiment à s'y retrouver dans ces combats écologistes qui semblent n'avoir pas la moindre cohérence. Militer contre les émissions de gaz à effet de serre par l'avion ou la route et s'opposer, dans le même temps, à la solution alternative zéro carbone, c'est un déraillement de la logique.

On a exactement le même débat pour la ligne Lyon-Turin. Les militants du climat sont soudain devenus contre un projet ferroviaire qui retirera un million de camions par an des vallées alpines. Ça s'appelle vouloir tout et son contraire. Point. Ou plutôt ne rien vouloir et surtout son contraire.

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