Tous les matins après le journal de 8h30, Emmanuelle Ducros dévoile aux auditeurs son «Voyage en absurdie», du lundi au jeudi.
Mercredi dernier, 28 militants “Faucheurs volontaires” comparaissaient devant le tribunal de Rodez, dans l’Aveyron, pour une intrusion dans une usine semencière, en décembre 2021. Une première.
Ils avaient, à l’époque, détruit des tonnes de semences, dont ils estimaient que c’étaient des OGM. Ils avaient tort. Mais ce n’est pas cela l’important.
L’important, c’est que pour la première fois, on a senti une peur de la condamnation chez les militants. Jugé en en correctionnelle, une nouveauté. « Ils veulent nous faire payer des milliers, voire des millions d’euros, avec des dommages et intérêts. La plupart du temps, les poursuites étaient abandonnées… » s’inquiétait un Faucheur cité par Centre Presse.
On comprend sa surprise : d’habitude, c’est l’impunité la plus totale. En 10 ans, 35 saccages de programmes de recherche ou de culture ont eu lieu en France, 1 seule condamnation symbolique. Le jugement sera rendu le 28 juin.
Ce procès prend une couleur particulière à la lumière des événements qui se sont déroulés ce week-end, non loin de Nantes.
Les militants du mouvement informel des Soulèvements de la Terre, ce groupe de justiciers autoproclamés de l’environnement, se sont livrés à diverses déprédations.
Ravagée, la plantation de muguet bio qui a le tort d’être irriguée légalement ; Lacérées les serres sous lesquelles une entreprise testait des cultures de nouvelles variétés de salades. Piétinées, arrachées, les cultures expérimentales. Pour les Soulèvement de la Terre, ça ressemble vaguement à de l’agro industrie, ils se sont donc attribué un permis de casser.
Mais cette fois-ci, ça ne passe pas comme une lettre à la poste.
Non, il y a eu une vague d’indignation sur les réseaux sociaux. Même la climatologue membre du Giec, Valérie Masson Delmotte, qui soutient d’ordinaire le groupuscule a dit son incompréhension. Nombreuses ont été les voix à dénoncer la stupidité de l’action.
Les Soulèvements de la terre ont détruit des expériences qui visent à cultiver des salades en pleine terre, sous serre, oui, sans pesticide, et très peu d’eau.
Saboter consciencieusement les solutions émergentes contre les maux qu’on dénonce quotidiennement... On a rarement fait plus bête, plus contreproductif. On a rarement tiré une balle dans le pied de la cause qu’on prétend défendre avec autant d’imbécillité superbe.
Les Soulèvements de la Terre ont tenté de répondre, ils se sont emmêlé les pinceaux.
Le thème de “ la grosse agroindustrie” n’a pas fonctionné. Ils se sont fait vertement rappeler que la France importe plus de la moitié des fruits et des légumes qu’elle consomme, notamment du Maroc et d’Espagne. Des pays pas réputés pour leur gestion de l’eau, de la terre et de la main d’oeuvre... Et que dans une période d’inflation où nombre de nos concitoyens modestes peinent à acheter des produits frais, il est insultant de détruire des efforts de production vertueuse et abordable..
Y aura-t-il des suites judiciaires ?
Dans n’importe quel Etat de droit, il y en aurait. La destruction du bien d’autrui ne doit pas être tolérée et on doit en répondre devant la justice. C’est ce qui garantit contre l’inique, l’arbitraire, et ceux qui se font justice eux-mêmes.
En France, les actes de vandalisme en réunion sont punis de 5 ans de prison et 75 000 € d'amende, si la justice se décide à ne pas fermer les yeux, comme elle l’a fait si longtemps avec les Faucheurs volontaires. Espérons du courage de l’institution et aussi du personnel politique, qui doit condamner.
Ces raids des Soulèvements de la Terre vont finir par mal tourner. Leur seul chance est qu’ils aient jusqu’ici, en face d’eux, des victimes plus civilisées qu’eux.