Gérard Collomb a estimé que les manifestants du 26 mai étaient "complices" des casseurs. Une sortie vivement critiquée, mais qui confirme la position particulière qu'occupe le ministre de l'Intérieur dans l'entourage d'Emmanuel Macron.
Il restera à jamais dans les archives de l’Ina, comme celui qui écrasa une larme le 14 mai 2017 à l’Elysée, face au président nouvellement élu. Émotif Gérard Collomb ? Peut-être. Conscient sans doute aussi de la belle revanche sur la vie qui s’offrait à lui. Car Gérard Collomb fut le Poil de carotte des socialistes. Celui qui a mené une carrière d’élu exemplaire, député, sénateur, maire d’une des plus grandes villes de France, Lyon, réélu de façon éclatante en 2014 quand les victoires socialistes se faisaient rares, mais qui n'a jamais été nommé ministre. "Trop à droite", ont toujours jugé les éléphants à la rose.
Une relation "quasi-filiale". En 2015, quand l’université d’été des socialistes à la Rochelle déclare persona non grata le ministre Emmanuel Macron, Gérard Collomb lui ouvre les portes de celle de son courant les Réformateurs. Les prémices d’une "relation fusionnelle, quasi-filiale", dit aujourd’hui le ministre de l’Intérieur à l’intention de son cadet promu.
Une voix sans filtre. Cette relation lui permet de se faire facilement pardonner ses sorties de route. Il peut sortir un "joker" sur les 80km/h, on laisse le soin à Edouard Philippe de lui rappeler la règle. Est-on vraiment si mécontent d’avoir un ministre qui se range du côté de l’opinion publique ? Quand il voit illico du "prosélytisme" dans le voile de la jeune dirigeante de l’Unef, d’autres ministres se chargent de rappeler que le voile n’est pas interdit en France et tout cela s’équilibre. Dernièrement, le ministre de l’Intérieur a laissé entendre que les manifestants anti-Macron se rendaient complices, par leur passivité, des casseurs. Une sortie que gauche n’a pas apprécié, mais que la majorité n'a pas encore commenté.
À l’Assemblée nationale, l'inflexibilité de Gérard Collomb et ses colères homériques ont fini par lui valoir quelques inimitiés de la part de députés marcheurs qu’il reçoit pourtant à tour de bras. "C’est quoi ce vieil homme qui se croit tout permis ?", fulmine l’un d’eux. Mais son texte sur le droit d'asile et l'immigration a passé la rampe exactement dans la configuration qu’il avait souhaitée.
Un acteur essentiel. Gérard Colomb a une place à part au sein du gouvernement. Au-delà du fait qu’il incarne une mission essentielle - la sécurité -, il est l’un des rares à faire de la politique dans un gouvernement largement dominé par les techniciens. Par le temps qu’il passe dans son fief de Lyon, il est le capteur de l’opinion publique pour Emmanuel Macron. Par son passé et son réseau d’élus, il est à la manœuvre avec tous les maires de centre droit et de gauche en vue des prochaines municipales. Avec son portefeuille, il peut même se permettre d’engager un bras de fer avec Anne Hidalgo sur la question de l’évacuation des migrants à Paris. Gérard Collomb finit par être trop à droite, même pour la majorité En marche!, mais il reste plus que jamais au centre du dispositif Macron. Au centre, enfin, de toutes les attentions.