Marc Messier brosse ce dimanche le portrait de Grace Mugabe, l'épouse du président du Zimbabwe, Robert Mugabe, qui rêve de lui succéder.
Une Panthère qui se prenait pour une lionne, comme les premiers mots d’une fable africaine. La morale est déjà là. La Fontaine au Zimbabwe. On entend déjà l’enthousiasme des griots d’Harare. Grace Mugabe ou l’histoire d’une petite dactylo devenue la secrétaire puis la maitresse et d’un vieux Dictateur. Il finira par l’épouser. Elle rêvera de le détrôner. Trop d’ambitions. Trop d’appétit. La grenouille voulut se faire aussi grosse que le buffle. Elle a explosé en vol. Grace Mugabe, l’une de ces "Mères de la Nation", selon le titre consacré, devenue une Lucrèce noire, dans la lignée des Winnie Mandela, Simone Gbagbo et autres Agathe Habyarimana, des héroïnes outrancières et narcissiques, vénéneuses et intrigantes, souvent furieuses, parfois meurtrières. Des femmes fatales Africaines, qui se sont imaginées Couronnées et qui n’ont réussi qu’à creuser la tombe de de leurs maris.
Grace à 52 ans. Une Belle Négresse, comme on dit naturellement sur le Continent, sans que cela ne choque personne d’autre que les Blancs. Une belle allure avec des coiffures aussi changeantes que les lumières de l’Afrique Australe, des lèvres aussi botoxées que dédaigneuses et le regard constrictor, de la Femme/Boa qui ne lâche jamais son interlocuteur avant son ultime tressaillement. Grace ou plutôt "Disgrace" pour l’appeler par le surnom que lui ont donné les Zimbabwéens. "Disgrace", le déshonneur, la honte d’un peuple, qui a toujours détesté cette femme devenue la "First Lady" après avoir longtemps été le 2ème bureau du Président, l’élégante formule africaine pour parler d’une maitresse officielle, celle que l’on voit aux heures de bureau, le reste de la journée étant réservé à la famille. Grace, une cocotte qui donnera 3 poussins au dictateur. Bob est encore marié, à l’époque, à Sally, une ancienne combattante de l’indépendance adorée des zimbabwéens, une intellectuelle charismatique, décédée il y a 25 ans, la seule, de mémoire de griot, capable de calmer les délires du libérateur de l’ancienne Rhodésie du Sud, devenu le plus vieux tyran du Monde.
Longtemps, Grace Mugabe sera restée cantonnée aux rôles de Première Dame des bonnes œuvres. Une potiche de luxe raffolant de tous les produits occidentaux, très chers et très "m’a-tu-vu". "The First Shopper" , la première acheteuse, l’un de ses autres sobriquets, ou encore "Gucci Grace", une dépensière pathologique, passant régulièrement au guichet de la banque centrale du pays pour faire remplir de dollars ses valises en croco, s’envolant dans la foulée, pour l’Europe ou l’Asie, dilapider l’argent de l’Etat. Vêtements de grand luxe, diamants, quelques jolies villas à l’étranger, Grace aurait claqué des dizaines et des dizaines de millions de dollars ces dernières années. Pas la meilleure image dans un Zimbabwe qui crève de faim, ou l’immense majorité de la population vit avec 50 dollars par mois.
Dissipatrice, mange-tout. Et méchante, par-dessus-le marché, une véritable furie tabassant un paparazzi un peu trop collant, il y a qq années à Hong-Kong ou frappant, l’été dernier, à coup de rallonge électrique une jeune mannequin sud-africaine qui reniflait d’un peu trop près ses 2 fils, lors d’un voyage à Johannesburg. On passera sur tous les ragots qui lui prêtent des amants, et les rumeurs qui charrient leurs cadavres, dans la foulée. Des coups de sang. Et le coup de Grace. Il y a quelques semaines, lorsque, dans un meeting politique, devant des milliers de personnes, la 1ère Dame se met à dire dit tout haut ce dont elle rêve tout bas. "Je dis ceci à M. Mugabe : vous devriez me laisser prendre votre place". Ses fans entrent en transe. Les généraux de l’armée se raidissent. Grace n’a plus de filtre. Son ambition est désormais évidente : Elle réclame le Trône d’Harare. Elle veut être La Reine à la place du Roi.
Le vieux despote ne bronche pas. Depuis des mois il passe tout à sa Femme et décapite tous ceux, dont Grace demande les têtes. Le dictateur n’aurait plus toute la sienne. A bientôt 94 ans, Mudhara, le vieux en langue Shona, serait de plus en plus gâteux, juste capable, selon les mauvaises langues, de répéter ce que lui soufflerait son épouse. L’haleine fétide de la Traitresse. Le coup de main des généraux. Grace en disgrâce. Les griots en liberté. La morale est sauve.