Ce matin Martial You consacre sa chronique à un style d’entreprise qui résiste mieux à la crise, il s’agit de PME familiale. Mais il faut bien avouer que travailler avec son père ou laisser la place à son fils n’est pas toujours évident.
C’est ce qu’on appelle une gestion de bon père de famille, et ça marche, une gestion plus humaine et surtout plus prudente. Pour autant, travailler en famille, ça se prépare parce que ça peut vite devenir un cauchemar. Nemoux en Seine-et-Marne, société Damem, couvreur de père en fils. Depuis 6 mois, Christophe a repris la maison créée par son père en 1973. Quarante salariés aujourd’hui dont certains présents depuis l’origine. Michel ne trouvait pas de repreneur et il n’avait pas forcément pensé à son fils de 36 ans. Il faut dire que Christophe est ingénieur aéronautique… "C’est une fierté, c’est très difficile de retrouver quelqu’un qui connaisse le métier, et on ne trouvait pas ! On a été heureux un jour quand Christophe nous a proposé de reprendre l’entreprise". Christophe déclare : "Je connais l’entrerprise puisque j’ai grandi avec. C’est l’entreprise familiale qui s’arrête. Quand j’ai vu que du même profil que le mien était sur le rang pour reprendre l’entreprise, je me suis dit que ce n’était pas possible, qu’il fallait que je le fasse. Je me suis tourné vers mon père et je lui ai demandé s’il pensait que techniquement c’était viable car seul lui pouvait le savoir". Selon le père, "au jour d’aujourd’hui, si l’entreprise n’a pas perdu de client c’est grâce à cela. Le nom Dameme reste là et le savoir-faire aussi".
Des PME certes mais si l’on regarde Bonduelle, Pernod-Ricard, Auchan, Michelin, JC Decaux, ces entreprises sont de grands noms de l’économie française et sont toutes possédées par des familles. Dans ce cas, il faut absolument savoir gérer la transmission, un acte qui se prépare pour éviter les problèmes ultérieurs lorsqu’un actionnaire se retire, quand il faut partager le patrimoine familial entre plusieurs enfants. Et ça c’est vrai pour les grands groupes et surtout pour les PME. Comme pour un mariage, il vaut mieux passer par un acte d’actionnaires, un pacte à sortir si jamais il y a un problème un jour. Argent et famille ne font pas forcément bon ménage. Jean Jourdieu du Cabinet KPMG : "Une entreprise, une PME, il a beaucoup d’affectif. Au niveau de la famille, on parle beaucoup de l’entreprise, il faut dépassionner le débat et raisonner pérennité de l’entrerprise, sécurisation du patrimoine de la famille et maintenir le consensus familial. C’est lorsqu’il n’y a pas de problème que l’on peut se mettre autour d’une table avec un avocat, de définir des critères intègres, indépendants, dépassionnés de tous problèmes personnels pour dire en cas de problème, quelle est la sortie ?".
Il vaut mieux prévoir une période de transition de quelques années pour former son successeur. On peut imaginer par exemple un système de double actionnariat où le fondateur cède progressivement ses parts mais attention le père doit aussi savoir céder sa place. On se heurt souvent à des conflits générationnels. Les temps ont changé, les méthodes de management aussi et tous les patriarches ne l’acceptent pas. "Je dois lui laisser maintenant faire son œuvre. J’ai des collègues maintenant qui ont des gros soucis car ils ont transmis leur entrerprise mais veulent toujours rester à la tête. Tout le monde fait des erreurs mais quand on en a faite une une fois, c’est pas plus mauvais". Christophe déclare qu’il a "bien conscience que Dameme est une image de marque aujourd’hui dans la région. Et c’est là qu’est la pression, car il faut réussir à conserver ce niveau-là et ne pas décevoir".
L’entreprise familiale n’est plus l’entreprise paternaliste aujourd’hui. Ces groupes ont souvent une vision à long terme, moins spéculative, car ils souhaitent transmettre à leurs enfants. La contrepartie de cette forme de sécurité c’est que les salaires sont aussi souvent jusqu’à 5% moins élevés qu’ailleurs.