MOF : L’édito politique d’Europe 1, bonjour Claude Askolovitch... Ils se sont tant aimés.... Dany Cohn Bendit et François Bayrou... Mais la campagne européenne est en train de les transformer en ennemis...
C.A : Et en ce moment, ils se disent les pires horreurs... de leur point de vue. Cohn Bendit dit que Bayrou a trahi l’Europe parce qu’il ne pense plus qu’à la présidentielle... Bayrou répond que Cohn Bendit... est devenu un complice de Sarkozy... Et ça prouve que l’amitié en politique, ça n’existe pas ! Ou ça ne résiste pas aux choses sérieuses... Vous avez une campagne européenne où les électeurs sont une espèce en voie de disparition... et tout le monde essaie de ne pas mourir... Bayrou a besoin d’un score du Modem pour sa course présidentielle ; Cohn Bendit a besoin d’un score des verts pour exister au Parlement européen... et ils sont d’autant plus violents qu’ils se disputent le même bout de territoire politique. Un exemple; le patron du Modem dans le sud est, c’est Jean-Luc Bennahmias, qui est un des premiers écolos de France... mais en Ile-de-France, la numéro deux de Cohn Bendit, c’est Eva Joly... qui avait d’abord donné sa parole à Bayrou... Chacun a essayé de tuer l’autre avant les élections, ça continue pendant la campagne, et leur seule excuse c’est qu’ils n’ont pas le choix!
MOF : Mais ils ont vraiment été amis, avant ?
C.A : En tous cas, ça y ressemblait vraiment... Ca se passait au parlement européen il y a quelques années. On voyait Bayrou offrir son livre sur Henri IV à Cohn Bendit pour son anniversaire... Et Cohn Bendit disait de Bayrou qu’il était la preuve qu’on pouvait être à la fois réac et sympa... et puis Bayrou a été de moins en moins reac... ou il a essayé. C’est avec Cohn Bendit qu’il a commencé son petit chemin vers la gauche... C’était amusant... de faire semblant... et puis c’est devenu vrai... Et puis, il y a eu la campagne présidentielle de 2007... Bayrou a pensé que les écologistes devaient l’aider. Il a couru après Nicolas Hulot par exemple... mais les écologistes l’ont snobé... et notamment Cohn Bendit, qui a essayé d’amener Bayrou à Ségolène Royal... C’est comme ça que l’amitié s’est brisée... Au fond, Bayrou considérait les verts comme un marchepied ! Et Cohn Bendit ne prenait pas Bayrou au sérieux... C’était évidemment insupportable
MOF : Donc, c’est l’orgueil qui les a séparés... ?
C.A : Et ce n’est pas une mauvaise raison... Sans une haute opinion de soi-même, on ne peut pas faire de la politique.... On peut trouver ça stupide politiquement, parce qu’il y aurait une logique possible; la création d’un centrisme écolo, qui ferait une vraie concurrence au PS... Mais plus leur alliance parait à la fois logique et impossible... plus ils ont besoin d’être violents pour justifier leur séparation... et le pire, c’est qu’ils ont un peu raison tous les deux. Cohn Bendit trouve vraiment que Sarkozy est quand même plus intéressant que la plupart des autres leaders français... Et Bayrou tient a un discours anti-Bruxelles... qui est celui des anti-européens classiques... Rien de tel qu’un ami déçu... pour révéler vos faiblesses !