MOF : Bonjour Claude Askolovitch… Nicolas Sarkozy reçoit les chefs de parti à l’Elysée... Il va parler devant le congrès à Versailles... C’est le tour d’honneur du Président après la victoire des Européennes ?
C.A : C’est du plaisir, ça se voit mais le plaisir est politique ! Il se passe une chose très curieuse... On a l’impression que Nicolas Sarkozy vient de devenir Président de la république! Ca fait quand même deux ans qu’il est élu mais on n’avait jamais eu cette impression de normalité. Il faut se souvenir que rien n’a été banal avec ce Président. Il a été élu de manière spectaculaire, il a été très populaire, et très vite, il a été très détesté, il y avait ces images affolantes en accéléré, les lunettes noires, le bling bling, et puis des bouleversements dans sa vie privée et puis la crise. On n’a jamais pu se poser et surtout les opposants du président ne le reconnaissaient pas. Il n’était pas légitime. Il y a encore quelques semaines... François Bayrou expliquait que Sarkozy était un enfant barbare. Maintenant, Bayrou, Monsieur 8% est venu gentiment à l’Elysée parler avec le chef de l’Etat. Et Martine Aubry aussi est toute heureuse d’aller à l’Elysée, ça la renforce. Il y a donc un Président.
MOF : Et il en fait quoi de sa nouvelle élection…
C.A : Ce qu’il a toujours fait des réformes, et des discours mais avec la possibilité de donner du sens, du poids, il joue à domicile. Parler devant le congrès à Versailles, c’est ce qu’il a voulu dans sa nouvelle constitution. Il y a deux axes. Le nouveau capitalisme, la régulation ce lundi il y aura un discours devant l’organisation internationale du travail. Ensuite, il y a l'environnement. Et puis l’Europe. La vraie rencontre politique hier, c'était avec Angela Merkel. La photo des vainqueurs, mais surtout la photo des patrons de l'Europe. Si ces deux là soutiennent Baroso, ce n'est pas parce qu’ils le trouvent génial. C’est parce que Baroso leur devra tout, il ne sera pas gênant. Il sera un exécutant de leur politique. Un Fillon européen.
MOF : A vous entendre, le nouveau président Sarkozy aurait donc un boulevard devant lui ?
C.A : S’il le pense, il va déchanter. Il est le seul point fixe de la politique française mais ça ne garantit rien. Il y a la crise, la situation sociale, des manifestations qui reprennent - les syndicats défilent demain, des éruptions de violence sociale. Les européennes n'ont pas permis l'expression d'une opposition politique... on ne va pas enfoncer le clou tous les jours sur l'état de la gauche ou du centre. Mais ça veut dire que Sarkozy est directement en face du pays, et ce pays ne va pas mieux parce que l’UMP a fait 28% aux européennes. Il y avait un grand psychanalyste qui s’appelait Jacques Lacan, il avait donné cette définition du réel. Je vous la donne Marc Olivier. "Le réel, c'est quand on se cogne." Maintenant, après la parenthèse enchantée des européennes, le nouveau président Sarkozy va se cogner à la réalité...