Nous ne sommes plus dans les pages people, répète Libération comme pour ne pas donner l’impression de s’abandonner à une basse chronique. L’affaire Bettencourt est passée aux pages économiques !
Fort de cet axiome (de fait, le différend familial qui mine la 3ème fortune de France pourrait déstabiliser le groupe L’Oréal), le journal ouvre en grand le dossier médical de Liliane Bettencourt. Souffre t-elle de troubles du cerveau qui l’ont amenée à donner près d’un milliard d’euros (sous forme de chèques, de propriétés, de toiles de maître...) au photographe ‘insistant et opportuniste’ François-Marie Banier, comme l’affirme sa fille ? Agée de 86 ans, madame Bettencourt, apprend-on, a subi divers examens médicaux depuis 2002 : IRM, puis scanner à l’hôpital américain de Neuilly, consultation d’un neurologue à celui de la Pitié Salpétrière. Ce dernier, en 2007, constate une altération des facultés mentales (des absences) et imagine un placement sous curatelle. Depuis Liliane Bettencourt s’est défendue dans des interviews : j’ai toute ma tête. Et ses avocats, qui ont produit une expertise allant dans ce sens, refusent un nouvel examen par un expert désigné par la justice. L’enquête de Libé est signé Guillaume Dasquié, spécialiste des affaires en eaux troubles en rapport avec la géopolitique et qui s’est penché avec minutie sur une fortune sous haute pression. Il raconte l’ouverture d’un coffre à la BNP de la place de l’Opéra le 3 décembre 2008 à 9 h 30 ! Plus qu’un coffre une armoire d’un mètre 20 de haut. Avec à l’intérieur ? Des rivières de diamants, des émeraudes, des rubis. Un huissier et deux avocats de Liliane Bettencourt procèdent alors au recensement des pierres qui n’avaient jamais fait l’objet d’actes d’inventaire. Une responsable financière au service de la milliardaire redoutait que des disparitions de certaines pièces lui soient un jour reprochées. L’épisode traduit le climat de méfiance et la gêne autour des donations de la milliardaire, écrit le journaliste qui évoque à propos des largesses envers François-Marie Banier "du mécénat en tous biens tout honneur". Tous biens au pluriel, avec un s à tous et biens.
Puisque nous sommes à la rubrique économique, restons-y avec la guerre des nerfs au Club Med, comme disent Les Echos dans une enquête d’une page.
Le feuilleton qui oppose Bernard Tapie à Henri Giscard d’Estaing défraie la chronique. Le Club Med vient de publier de nouveaux mauvais résultats, un chiffre d’affaires en baisse et une perte de 22 millions d’euros au 1er semestre. Racheter le Club ? Tapie ne dit pas non, lit-on à la Une de Libé. Il ne dit pas oui non plus. "Je me déciderai au plus tard fin juin. Car j’ai pas envie de m’emmerder avec ça pendant mes vacances. Bon là, je suis désolé mais il faut que je vous quitte, j’ai plus important à faire. - vous répétez votre pièce, lui demande le journaliste au téléphone. - Non, je pars faire du vélo." L’ex homme d’affaire, ex chanteur, ex ministre (comme le soulignent Les Echos) souffle le chaud et le froid sans détenir à ce jour la moindre action. Le quotidien économique voit là l’affrontement de 3 marques mythiques, incroyablement excitantes, lourdes de symboles : Tapie, le bateleur, Giscard d’Estaing fils, son antithèse mais qui lui aussi est doté d’une potentielle férocité (il faut l’entendre l’air de rien mais avec une lueur carnassière dans l’œil évoquer ‘les amis russes de Tapie), enfin le Club Med, marque emblématique pour les Français. La justice est saisie par le Club. Les attaques personnelles sont jugées "scandaleuses" dans un communiqué publié ce matin. Dans Libé, Bernard Tapie dit que la boîte est gérée n’importe comment, et accuse Henri Giscard d’Estaing d’être rémunéré par les plus-values de cessions réalisées sur la vente de vieux Club alors que l’entreprise perd de l’argent.
A lire ce matin encore, l’enquête du Parisien qui vient valider les révélations récentes du Figaro sur la braderie des examens en facs.
Des éditos lugubres pour le PS, dans France-Soir et Le Figaro. "Ses traits se creusent, il maigrit à vue d’œil", écrit Paul-Henri du Limbert. Martine Aubry, accablé par Le Monde pour son absence de remords, est sous la pression des éléphants, va-t-elle trouver refuge auprès de Nicolas Sarkozy. Il a déjà éloigné DSK, il va rencontrer la première secrétaire plus souvent. Tous deux sont d’accord, le chef de l’Etat estimant que "l’opposante Martine Aubry n’a jamais dépassé les bornes de la bienséance démocratique." Il ne pense pas la même chose de François Bayrou qu’il reçoit aujourd’hui, qui lira utilement la page 7 du Parisien sur le coup de grâce qu’aimerait lui porter Nicolas Sarkozy. Les manœuvres d’encerclement ont commencé, pour l’é-li-mi-ner.