Axel de Tarlé consacre sa chronique économique au secteur laitier. Dans Europe 1 matin, avec Marc-Olivier Fogiel.
Dans une lettre commune, écrite avec son homologue allemand, Bruno Lemaire, le ministre de l'agriculture, demande de suspendre la libéralisation du secteur laitier.
La politique du laisser-faire, du tout libéral, a également fait des dégats dans l'agriculture, pour les producteurs de lait notament. Si l'on revient un an et demi en arrière, début 2008, on était, à l'époque, dans une sorte d'euphorie laitière. Suite à une sécheresse dans l'hémisphère sud, en Nouvelle-Zélande, on a manqué de lait, et les cours mondiaux du lait se sont envolés. Du coup, mû par un souffle libéral (et l'appât du gain, il faut le dire), le secteur du lait a été libéralisé. On a relevé les quotas de production, avec même l'idée de carrément les supprimer en 2015. Et puis, les prix du lait, qui étaient très régulés, se sont rapprochés des cours mondiaux. Du coup : Bingo ! Les producteurs laitiers ont connu une année 2008 exceptionnelle, avec des revenus en hausse de 20 %. Et puis, patratras, exactement, comme à la bourse, on a eu un krach, avec trop de lait en circulation. Sauf qu'on n'arrête pas une vache laitière comme on coupe un robinet. Du coup, les prix se sont effondrés et les producteurs de lait ont vu leur revenus quasiment divisés par deux ! D'ou cette volonté franco-allemande, aujourd'hui, de revenir à plus de régulation.
En fait, c'est le grand retour de la PAC (Politique agricole commune), avec ses fameux "quotas laitiers" et des prix sous contrôle.
Il faut produire raisonnablement, pour le marché européen, à des prix corrects. L'idée, c'est de ne plus dépendre des cours mondiaux, que nos producteurs de lait de Normandie ou d'Auvergne ne dépendent plus de la météo en Nouvelle Zélande ou en Argentine. C'est en effet l'idée de base de la PAC. L'alimentation est une chose trop stratégique pour être soumise aux aléas du marché mondial. Il faut une régulation européenne. Et c'est vrai que l'on entend aujourd'hui exactement le même discours avec les banques. Finalement, on le voit, avec cette crise : pour tous les secteurs stratégiques (l'agriculture, la finance), c'est la fin du laisser-faire et le grand retour du politique, de l'Etat régulateur. Bruno Lemaire rencontre ce matin José Manuel Barosso, le président de la Commission, pour lui faire part de ces propositions franco-allemande.