Oui. Opel est au bord du gouffre. Mais Opel a de beaux restes. Des technologies, des savoir-faire qui pourraient faire gagner beaucoup de temps aux industriels des pays émergents. Alors passons sur la candidature chinoise, qui semble être arrivée trop tard, en fin de semaine dernière, pour être vraiment prise en compte. Mais celle des Russes, est autrement plus sérieuse car ils ont un faux nez. L'équipementier canadien Magna. Sur le papier, Magna a tout pour plaire. Son fondateur, Frank Stronak a quitté l'Autriche il y a 50 ans avec 200 dollars en poche et une formation d'apprenti. Aujourd'hui son entreprise, Magna, est devenue un équipementier important qui emploie 70.000 personnes dans 25 pays. Sauf qu'avec la crise, Magna perd de l'argent. Plus de 500 millions de dollars en un an. Et pour reprendre Opel, il a du s'allier aux Russes : une banque la Sberbank, et surtout, Gaz, un constructeur qui appartient à l'oligarque Oleg Deripaska, un très proche de Vladimir Poutine. Dans l'offre de Magna, les Russes, prendraient 35% d'Opel. Magna, seulement 20%. Même si GM et les salariés d'Opel gardent le reste, le loup russe sera très puissant dans la bergerie. On imagine que les autorités allemandes vont y réfléchir à deux fois avant de se décider... Bien sûr.
Mais le problème immédiat d'Angela Merkel, c'est le chômage. Or Opel c'est 25.000 emplois directs en Allemagne.Et l'offre de Magna est moins coûteuse en suppression d'emplois que celle de Fiat. C'est normal. Magna n'a pour l'instant qu'une usine d'assemblage en Autriche, et avec ses alliés, il a besoin de l'outil industriel d'Opel en Europe de l'Ouest, même un peu amaigri. Fiat au contraire est comme tous ses concurrents européens, confronté à la question des surcapacités. Et puis il y a une autre dimension très sensible aussi en Allemagne. Si Fiat, qui est déjà en train de racheter Chrysler, met aussi la main sur Opel, il va vraiment entrer dans la cour des très grands : 80 milliards de chiffre d'affaires, autour de 7 millions de voitures par an. Un Volkswagen bis.
C'est un vrai casse-tête cette histoire... Exactement. Soit les Allemands privilégient la consolidation en Europe occidentale, hypothèse Fiat, et ils aggravent le chômage chez eux. Soient ils privilégient l'emploi maintenant - hypothèse Magna - et les Européens de l'ouest risquent de se retrouver d'ici peu avec un nouveau concurrent de poids. Un russo-canadien donc, à qui on peut faire confiance pour faire d'Opel, un tête de pont agressive sur un marché déjà saturé. C'est dur à dire, mais le choix, c'est entre le chômage aujourd'hui et le chômage un peu plus tard. Le gouvernement allemand doit faire son choix cette semaine. Il y a déjà une réunion aujourd'hui à Berlin. General Motors n'aura plus ensuite qu'à entériner ce choix.