Sept jeunes femmes violées et égorgées en sept ans. Voici le parcours criminel de Guy George, le "tueur de l'Est parisien", qui a terrorisé la population de la capitale entre 1991 et 1998. Près de 14 ans après sa condamnation à la perpétuité en 2001, SK1, un film qui revient sur l'affaire sort dans les salles mercredi. Me Frédérique Pons, l'avocate du tueur lors de son procès aux assises, était l'invitée d'Europe 1 lundi matin.
Comment en étant femme, peut-on défendre Guy Georges ? "Être avocat, c'est défendre tout le monde et je crois que plus les charges sont lourdes à l'encontre de quelqu'un, plus on a envie de le défendre. Je ne crois pas au monstre, c'est un principe. Tout être à droit à une défense. Bien sur que les faits sont monstrueux, mais quand j'ai rencontré Guy Georges deux à trois mois avant les assises, il disait : 'ce n'est pas moi'", confie l'avocate.
A-t-elle cru en son innocence ? "Ce que croit l'avocat est assez indifférent. Ce qui est important, c'est ce qu'il y a dans le dossier et ce qui est plaidable ou non. Et donc ce que l'avocat croit pouvoir plaider", estime Frédérique Pons. "Il ne faut pas oublier que pendant plusieurs années, on considérait que c'était plusieurs affaires différentes, qu'il pouvait y avoir plusieurs personnes (plusieurs tueurs, Ndlr). N'oubliez pas qu'en 1995, donc deux ans avant d'être arrêté, il (Guy Georges, Ndlr) s'est présenté aux policiers et est d'abord mis hors de cause. On lui a fait un prélèvement ADN à ce moment-là, et ce prélèvement ne correspondait pas au fameux SK1, (l'ADN retrouvé sur différentes scènes de crime et considéré comme celui du l'auteur, Ndlr)", rappelle-t-elle.
Comment a-t-elle fait avouer son client? "La première semaine du procès est très difficile et cela se termine avec cette question, que l'on voit dans le film : 'est-ce que vous êtes gaucher ou droitier ?'. Et Guy Georges, au lieu de répondre à cette question, il fait ce geste effroyable comme s'il brandissait un couteau", raconte l'avocate du tueur. "On nous a dit, c'est vous (les avocats de Guy Georges, Ndlr) qui l'avez fait avouer… Mais c'est à ce moment là que Guy Georges a tout dit. Après cela a basculé, il s'est muré dans le silence et on l'a seulement amené à aller jusqu'au bout", jusqu'aux aveux.
Quelle est la singularité de Guy Georges ? "En France, il n'y a pas eu beaucoup de meurtriers en série. Ce qui est effrayant, c'est la réitération et ce basculement de personnalité. En caricaturant, on parle de Dr Jeckyll et Mr Hyde… mais c'est cela. D'un côté, on a un personnage très sympathique et, de l'autre, un personnage qui est habité par une violence infinie", décrit-elle.
Quand peut-il être libéré ? "Quand il en sera décidé. De toute façon, il y a une période de sureté de 22 ans, c'est-à-dire que pendant 22 ans il ne peut rien se passer", élude Me Pons, alors que Guy Georges est libérable en 2020. Un individu comme Guy Georges a-t-il sa place en prison, plutôt qu'en hôpital psychiatrique ? "Ce n'est certainement pas à moi de le dire, mais cela pouvait être dans un hôpital psychiatrique. Mais c'est le débat complexe de la loi française. On vous dit : 'vous êtes un psychopathe, c'est-à-dire vous êtes malade, mais vous êtes responsable de vos actes'", poursuit-elle.
"A partir du moment où on nous a dit qu'il était psychopathe, qu'il était malade, il a le droit à un traitement, à quelque chose. Un expert a parlé d'un epsilon de chance de réhabilitation, moi je reste optimiste et je reste sur cet epsilon. Mais à la fois pour lui et la société, il faudra trouver la meilleure solution", estime l'avocate. Et si, aujourd'hui, elle devait le défendre à nouveau ? "Je recommencerais", assure Frédérique Pons.