L'info. "Nous devons être intraitables devant l'apologie du terrorisme et ceux qui s'y livrent" a rappelé François Hollande, lors de l'hommage solennel aux trois policiers, mardi matin. Une ligne de conduite suivie et appliquée par les tribunaux. Car une semaine après l'attentat contre Charlie Hebdo, 54 procédures judiciaires ont déjà été ouvertes pour "apologie du terrorisme" et "menaces d'actions terroristes", a indiqué mercredi matin le ministère de la Justice. Parmi celles-ci, l'apologie du terrorisme seule concerne 37 procédures. Et les premières condamnations se multiplient, en vertu de l'application de la loi antiterroriste portée par Bernard Cazeneuve, adoptée le 13 novembre 2014.
Un an ferme à Nanterre. Un jeune homme a été condamné, mardi soir, à Nanterre à un an de prison ferme pour apologie du terrorisme et immédiatement incarcéré. Agé de 22 ans, il était jugé en comparution immédiate pour avoir posté sur Facebook, le lendemain de l'attaque contre l'hebdomadaire satirique, une vidéo "dans laquelle il se moque du policier abattu sur le trottoir lors de la fusillade", Ahmed Merabet. Déjà connu des services de police pour des affaires de stupéfiants, l'homme avait été interpellé lundi à Rueil-Malmaison, dans les Hauts-de-Seine, où il réside.
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10 mois ferme à Toulouse. La lutte contre le terrorisme "doit se mener à tous les niveaux, c'est l'affaire des citoyens mais aussi des magistrats, il ne faut pas reculer d'un centimètre", a souligné Patrice Michel, procureur de la République, après qu'un homme a été condamné à 10 mois de prison ferme pour apologie du terrorisme, lundi, à Toulouse.
Vendredi vers 18 heures, ce jeune homme de 21 ans s'en était pris aux contrôleurs alors qu'il voyageait sans titre de transport dans le tramway. Face à eux, il a clamé sa solidarité avec les djihadistes : "Les frères Kouachi, c'est que le début, j'aurais dû être avec eux pour tuer plus de monde". Le jeune homme, sans profession, également condamné pour violences, a été aussitôt écroué. Sa peine de 10 mois a été alourdie de deux mois par révocation d'un sursis accompagnant une précédente peine. "Nous avons appliqué pour la première fois la loi du 14 novembre 2014 [ndlr : loi du 13 novembre parue au Journal Officiel le 14] renforçant les dispositions de lutte contre le terrorisme", a souligné Patrice Michel.
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Quatre ans ferme à Valenciennes. Cette fois, c'est un homme de 34 ans qui a été condamné, lundi, à quatre ans de prison. Il avait fait l'apologie des frères Kouachi lors de son arrestation en état d'ivresse après un accident de voiture, a annoncé le parquet de Valenciennes, dans le Nord. Au moment de son interpellation, l'automobiliste a tenu "des propos particulièrement virulents sur le bien-fondé des actes de terrorisme commis la semaine dernière", a précisé François Pérain, le procureur."Il devrait y en avoir plus des Kouachi. J'espère que vous serez les prochains [...] Vous êtes du pain béni pour les terroristes", a-t-il notamment lancé aux policiers venus l'arrêter, en référence aux deux auteurs de la tuerie à Charlie Hebdo mercredi.
Outre les quatre ans d'emprisonnement, le trentenaire a écopé d'une annulation de son permis de conduire pendant deux ans et d'une interdiction de ses droits civils et de famille pendant trois ans. Le prévenu, originaire de Douchy-les-Mines, a fait l'objet d'une comparution immédiate pour conduite sous l'emprise d'un état d'ivresse manifeste et refus de se soumettre aux vérifications en état de récidive, blessures involontaires, et apologie d'actes de terrorisme. Il avait percuté un autre véhicule et blessé légèrement un père et sa fille de 12 ans samedi à Haulchin, dans le Nord.
Six mois ferme en Isère. Un homme de 28 ans qui avait notamment crié à l'adresse de policiers : "ils ont tué Charlie, moi j'ai bien rigolé", a été condamné mercredi à six mois de prison ferme par le tribunal correctionnel de Bourgoin-Jallieu, dans l'Isère.
Jugé en comparution immédiate pour apologie directe et publique d'acte terroriste, cet habitant de Bourgoin-Jallieu qui présente, selon une expertise psychiatrique, "une déficience mentale légère depuis l'enfance" et une personnalité "fragile" et "immature", a reconnu les faits. Il a fait l'objet d'un mandat de dépôt et a vu également révoquer une peine de sursis d'un mois de prison, prononcée lors d'une précédente condamnation.
Renvois des procès à Strasbourg... Lundi, le tribunal correctionnel de Strasbourg a renvoyé au 27 janvier le procès d'un jeune homme qui comparaissait pour apologie sur les réseaux sociaux de l'attentat contre Charlie Hebdo, mais a maintenu sa détention. Âgé de 30 ans, ce père de deux enfants et marié, avait relayé une photographie montrant un fusil d'assaut posé sur le sol, avec plusieurs munitions, et cette phrase : "Bons baisers de Syrie, Bye bye Charlie". Outre cette publication, les enquêteurs avaient également mis la main sur divers messages, comme "Les frères, réveillez-vous" ou "Mettez-vous opérationnels pour défendre vos sœurs, vos mères". Le prévenu souhaitait ne pas être jugé dans le contexte de vive émotion que connaît le pays après l'attentat contre Charlie Hebdo et les attaques qui ont suivi.
Et à Nice. Le tribunal correctionnel de Nice a également renvoyé lundi, au 4 février, le procès d'un jeune homme poursuivi pour "outrage et apologie d'actes de terrorisme", et l'a maintenu en détention provisoire. Âgé de 18 ans et domicilié à Nice, il était présenté au tribunal en comparution immédiate pour des faits commis le 9 janvier dernier, au surlendemain de l'attentat perpétré contre Charlie Hebdo. Il lui est reproché un geste obscène à l'encontre de policiers dans un quartier sensible de Nice, et surtout, de leur avoir crié à deux reprises : "100% Kouachi", du nom des deux frères responsables de l'attentat.
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Des condamnations pour "violences", "menaces". Par ailleurs, deux autres prévenus ont été condamnés pour "violences" sur agents et "menaces", mais pas pour le nouveau délit d'"apologie publique d'actes de terrorisme". L'un, né en 1992, a été condamné à 10 mois ferme et emprisonné pour "violences" sur agent, "outrages", "provocation à la haine", "menaces de mort". Selon l'accusation, l'homme en état d'ébriété avait lancé devant des policiers, vendredi soir, mais pas en public : "On va tous vous niquer à la kalachnikov" et "je vais venir au commissariat pour faire comme à Paris".
L'autre a été interpellé à la suite d'une altercation en sortie de boîte de nuit, dimanche. Il a été condamné à trois mois ferme avec mandat de dépôt pour "violences" volontaires sur fonctionnaire de police et "menaces". Ivre, il est notamment accusé d'avoir crié qu'il voulait "faire le djihad" et tuer les agents "à la kalach".
En vertu de l'article 421-2-5 du code pénal, l'apologie du terrorisme est punie de cinq ans de prison et de 75 000 € d'amende. Mais "lorsque les faits ont été commis en utilisant un service de communication au public en ligne", les peines peuvent aller jusqu'à sept ans d'emprisonnement et 100 000 € d'amende.