"On a mal dormi. Mais on veut croire que c'est la fin du cauchemar". Abdelkader Azzimani et Abderrahim El Jabri, condamnés à 20 ans de réclusion en 2004 pour le meurtre d'un jeune dealer, ont abordé lundi la première journée de leur procès en révision devant les assises du Gard à Nîmes avec l'immense espoir d'être acquittés.
Le parcours judiciaire. Les deux hommes, reconnus coupables du meurtre en 1997 d'Abdelaziz Jhilal, dit Azzouz, un dealer de 22 ans, ont passé 12 et 13 ans derrière les barreaux. En mai 2003, ils avaient été condamnés à 20 ans de réclusion pour "homicide volontaire" à Montpellier, puis pour "complicité d'homicide" en appel. Ils avaient bénéficié d'une libération conditionnelle en 2009 et 2011, et avait obtenu la révision en juillet 2012. "Un moment très fort, avait expliqué Abderrahim El Jabri, invité de Nicolas Poincaré sur Europe 1.
Revirement de témoin. Une demande de révision avait été déposée en 2008, qui avait entraîné de nouvelles investigations en janvier 2009. A l'origine du rebondissement, le revirement d'un témoin, décrit par la défense comme alcoolique et mythomane, et plus tard la mise en cause d'un nouveau suspect lors d'une expertise sur trois traces ADN. Trois autres profils ont été également retrouvés lors de ses analyses, mais ils restent inconnus.
Deux hommes condamnés. Le meurtre d'Azzouz, sur fond d'un trafic de 5 kilos de résine de cannabis, a ainsi fait l'objet d'un nouveau procès, la cour d'assises à Montpellier condamnant en novembre dernier deux hommes à 20 ans de réclusion pour "assassinat". Les deux condamnés ont mis hors de cause Azzimani et El Jabri et n'ont pas fait appel. Pour ce procès en révision, Azzimani et El Jabri ont obtenu lundi de s'installer aux côtés de leurs avocats, Me Luc Abratkiewicz et Me Jean-Marc Darrigade, plutôt que dans le box des accusés. "C'est une première victoire", ont souri leurs défenseurs.
"Je suis un bon garçon". "La justice m'a arraché mon père quand j'avais 5 mois et me l'a rendu quand j'étais collégienne. Elle me l'a rendu plein de maladies", a dit Soukaïna, la fille d'Azzimani. "J'aurais aimé que mon père soit là pour voir que je suis un bon garçon", a pour sa part dit M. El Jabri, 48 ans. A la barre, cet homme n'a pas caché pas son émotion en parlant de sa famille, de sa mère "très malade" ou de son père décédé. Condamné à deux reprises dans les années 90, il n'a pas nié ses errements de jeunesse. "J'avais choisi la facilité", a-t-il expliqué.
"Zones d'ombres". L'acquittement n'est toutefois pas gagné d'avance. Pour les parties civiles, qui évoquent des "zones d'ombre", les expertises médico-légales ont montré qu'on ne peut exclure l'hypothèse d'un nombre supérieur à deux auteurs. Elles ont demandé la lecture d'une écoute téléphonique d'une sœur d'El Jabri. Cette dernière y fait état d'un "homme dangereux". "Est-ce de vous dont on parle?", a demandé Me Bruno Ferri. El Jabri a acquiescé, avant qu'un de ses avocats ne rappelle qu'il ne s'agissait que d'un vol de couches-culottes. M. Azzimani, 49 ans, a aussi reconnu le trafic de drogue pour lequel, comme El Jabri, il avait écopé de six ans de prison. Le verdict est attendu jeudi.
JUSTICE - Deux hommes accusés à tort de meurtre ?
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TÉMOIGNAGE - El-Jabri : "un moment très fort"