Quatre ex-employés d'une filiale d'investissement boursier du Crédit Agricole comparaissent à partir de lundi devant le tribunal de Nanterre, accusés d'avoir prélevé au détriment de plusieurs caisses de retraite des commissions abusives dépassant les 100 millions d'euros. L'ancien directeur du département "vente de produits dérivés et obligations convertibles" du Crédit Agricole Indosuez Cheuvreux (CAIC, aujourd'hui Crédit Agricole Cheuvreux), Didier Hannoun, est poursuivi pour "escroquerie et faux". Il encourt cinq ans de prison. Son adjoint de l'époque, Eric Taieb, et deux autres collaborateurs sont également poursuivis. Les prévenus sont soupçonnés d'avoir entre 1998 et 2000 multiplié les transactions boursières, prélevant au passage des marges abusives, sans les déclarer à leurs clients. Objectif, selon l'accusation, faire gonfler artificiellement le chiffre d'affaires de CAIC et percevoir en conséquence, notamment pour Didier Hannoun, de confortables bonus.
"Ils sont rentrés dans une espèce de spirale, un peu comme dans le dossier Kerviel", souligne une source proche du dossier. En janvier 2000, la Cancava, la caisse de retraite des artisans, détecte une opération suspecte et évalue ses pertes à près de 30 millions d'euros. Dans la foulée, six autres caisses clientes s'aperçoivent avoir été victimes des mêmes pratiques. Le préjudice total avait été évalué en 2001 à 105,66 millions d'euros par le Conseil des marchés financiers (CMF), aujourd'hui intégré au sein de l'Autorité des marchés financiers (AMF). Le CAIC avait remboursé l'intégralité de cette somme à ses clients floués.
Sollicités par l'AFP, les conseils des prévenus, dont l'avocat de Didier Hannoun, Me Eric Dupond-Moretti, n'ont pas souhaité s'exprimer avant l'audience. L'ancien conseil de Me Hannoun, Jacques Valluis, s'était, en 2008 au moment du renvoi de son client devant le tribunal, étonné que les dirigeants de l'époque du CAIC aient été "totalement écartés du dossier". L'ancien PDG, Jean Chodron de Courcel, parent de Bernadette Chirac et ancien directeur adjoint au cabinet d'Alain Juppé à Matignon, entendu comme témoin assisté dans cette affaire, n'a pas été renvoyé devant la justice. Il a écopé en 2001 d'un blâme du CMF et d'une amende de près de 61.000 euros. Quant à Didier Hannoun, il s'est vu retirer sa carte professionnelle pour cinq ans avec une amende de plus de 3,7 millions d'euros. Le procès doit durer jusqu'au 18 octobre.