Terrorisme : "Apporter une réponse philosophique"

© JACQUES DEMARTHON / AFP
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Noémi Marois
INTERVIEW E1 -

Pierre Joxe, ancien ministre de l'Intérieur et de la Défense, était l'invité d'Europe 1 samedi matin.

"Quelque chose d'extraordinaire" s'est passé vendredi avec un travail de "coordination de nombreux services de police et de renseignement", s'est félicité l'avocat Pierre Joxe. Le socialiste qui a été plusieurs fois ministre, notamment de l'Intérieur et de la Défense, rappelle cependant que la situation "est nouvelle". Comparé aux années 1980, la police doit faire face aujourd'hui à un réseau très internationalisé. 

Aucun service de sécurité n'est "parfait.  Pierre Joxe ne va jusqu'à dire que les actions policières de vendredi ont été "un sans faute", une "expression qui ne convient pas aux opérations des police". De plus, il rappelle que "beaucoup de choses ne sont pas encore connues", concernant les deux prises d'otages qui ont frappé la France vendredi. Soulignant que pour l'instant, il y a "un flou", il estime qu'aucun service de sécurité "n'est parfait", faisant référence aux Américains qui avaient repéré un des deux frères Kouachi.

Un "problème sociologique et ethnologique". "Qu'est-ce qui se passe en France pour que des jeunes Français nés en France puissent devenir ce que sont devenus ces garçons ?", se demande Pierre Joxe. Ce "problème sociologique et ethnologique" relève de "politiques sociales", selon l'ancien député de Saône-et-Loire. Il dit avoir "un début de réponse". Alors qu'il connaissait les revendications politiques des anciens mouvements terroristes d'extrême-gauche, aujourd'hui, "Al-Qaida s'abrite derrière la religion pour mener un combat politique et mener un gros business". "Sur le plan religieux, il n'y a aucun fondement", ajoute celui qui a été ministre de l'Intérieur de 1984 à 1986 et de 1988 à 1991.

Selon lui, on a affaire ici "à de jeunes exaltés, paumés, perdus, qui se laissent embarquer". Il invite à mener "une réflexion sur ces jeunes" tout en craignant la survenue "de nouveaux incidents".

Une "réponse philosophique" au terrorisme. La police n'est pas empêché de faire son travail correctement, soutient Pierre Joxe. Inutile, selon lui, de  voter de nouvelles lois. Il rappelle cependant qu'il y a eu des baisses d'effectifs ces dix dernières années.

"La réponse n'est pas uniquement judiciaire, sécuritaire ou législative mais aussi philosophique", explique-t-il à Europe 1. "Il ne faut pas laisser s'introduire l'idée que c'est l'islam qui est en cause mais c'est le gangstérisme international qui a des répercussions sur la jeunesse française", précise-t-il. Il parle de "malades", de "victimes de sectes" pour désigner les personnes qui se laissent entraîner dans les mouvances terroristes.

Un combat à mener "sur des années". Se réunir dans une manifestation dimanche ne suffira pas, juge Pierre Joxe même s'il sera bien présent dans ce cortège "utile". Le travail doit se faire "pendant des mois, des années pour s'occuper des enfants, surtout les garçons" qui vivent "dans une misère intellectuelle", estime-t-il.