L'ARRESTATION. Un ancien policier municipal, amateur d'armes, présent, selon l'analyse de son téléphone portable, dans la zone de la tuerie au moment des faits, le 5 septembre 2012. Un an et demi après la mystérieuse tuerie de Chevaline, l'arrestation mardi à Talloires, en Haute-Savoie, d'un homme de 48 ans est qualifiée d'"avancée importante dans l'enquête". Il s'agit en tout cas de la première interpellation dans cette affaire depuis celle, en juin dernier, au Royaume-Uni, de Zaïd al-Hilli, frère de Saad, soupçonné de "complot pour commettre un meurtre" et jusqu'ici seul suspect potentiel. Comment les enquêteurs sont-ils remontés jusqu'à cet homme ? Que sait-on de lui ? Où en sont les investigations ? Que va-t-il se passer désormais ? Europe 1 fait le point sur l'enquête.
Comment les gendarmes sont arrivés à cette interpellation ? Le 4 novembre 2013, les enquêteurs publiaient un portrait-robot du mystérieux motard aperçu par des témoins près de la scène de crime. Un élément semble-t-il décisif dans le processus qui a amené à cette arrestation. "Son interpellation (…) est le fruit des témoignages recueillis notamment après la diffusion (…) du portrait-robot d'un motard vu à proximité de la scène de crime et recherché activement par les enquêteurs", a précisé mardi Eric Maillaud, procureur d'Annecy. Selon le magistrat, l'homme présente "une forte ressemblance" avec ce portrait-robot, présentant un motard casqué et porteur d'un bouc.
Que sait-on de l'homme arrêté ? Âgé de 48 ans, père de trois enfants, l'homme est un ancien policier municipal de la localité de Menthon-Saint-Bernard, en Haute-Savoie. Le maire de cette commune, Antoine de Menthon, a précisé qu'il avait "été révoqué en juin", "radié de la fonction publique territoriale", et "prié alors de quitter son logement communal". Une source proche du dossier décrit un "montagnard taiseux", "amateur d'armes", vivant comme un "marginal". Il n'aurait pas de "lien direct" avec les victimes de la tuerie.
De quels éléments disposent les enquêteurs ? Mardi soir, les gendarmes ne disposaient pas "d'éléments déterminants" pour confondre ce suspect, selon une autre source proche de l'enquête. Pour autant, certains éléments n'en apparaissent pas moins troublants, comme l'analyse des données de son téléphone portable, situant l'homme dans la zone de la tuerie au moment des faits. Une information qui pour l'heure n'apparaît cependant pas déterminante, dans la mesure où l'homme habite la région.
D'autre part, de nombreuses armes ont été saisies lors de la perquisition de son domicile. Leur présence "confirme la passion de cet homme, collectionneur d'armes anciennes", a précisé une autre source. Donnée forcément intrigante quand on sait que l'arme du crime est ancienne : un Luger P06 de calibre 7,65 Parabellum, ayant équipé l'armée suisse. Mardi après-midi, des gendarmes ont perquisitionné une maison à Talloire. Les militaires ont sondé le jardin à l'aide d'un détecteur de métaux. En espérant mettre la main sur l'arme du crime, qui reste à ce jour introuvable ? Selon une source proche du dossier, une autre perquisition a eu lieu dans la commune proche de Lathuile. Les armes saisies mardi vont déjà faire l'objet d'examens balistiques pour voir si elles ont été utilisées.
Et maintenant ? D'autres interpellations pourraient intervenir, le procureur ayant précisé que l'interpellation du suspect de Talloire "ne restera peut-être pas unique". L'hypothèse d'un tueur isolé et agissant de son propre chef a été qualifiée mardi "d'hypothèse de travail parmi d'autres mais ce n'est pas l'hypothèse numéro une", par une source proche du dossier. Les enquêteurs tentent plutôt de faire le lien entre un ou des hommes de main locaux et un éventuel commanditaire. Les prochaines gardes à vue pourraient venir étayer ce scénario.
Pour l'heure, le suspect interpellé est entendu par les gendarmes de la section de recherche (SR) de Chambéry depuis mardi. Sa garde à vue pourrait se poursuivre pour durer au total 96 heures, l'information judiciaire étant ouverte pour "meurtres en bande organisée". On pourrait disposer de plus d'informations mercredi en milieu de journée, le procureur d'Annecy devant s'adresser à la presse à 14 heures.
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