"Vous ne possédez plus la nationalité française". Le procès qui l’opposera à l’administration française le mois prochain permettra à Sikhou Camara de savoir s’il a finalement la nationalité française. Pourtant, a priori, nul besoin d’une action en justice pour en être assuré, rapportent les journalistes de France 3 Haute Normandie. Cet homme est né au Sénégal, alors territoire français, en 1945. Son père avant lui avait combattu pour la France. Rien d’étonnant donc à ce que Camara Sikhou obtienne la nationalité française en 1966. Il a alors 20 ans. Dans sa carrière, il a travaillé quarante ans dans l’agglomération rouennaise comme soudeur. Il a pendant toutes ces années payé des impôts, a voté pour élire ses représentants. Mais le bureau de l’état civil de la Préfecture lui a malgré tout écrit en 2012 : "Vous ne possédez plus la nationalité française, à défaut de restitution de votre carte d’identité et passeport, votre état-civil et celui de votre fils feront l’objet d’une inscription sur le fichier des personnes recherchées."
Les raisons de cet imbroglio. En cause, l’âge auquel Sikhou Camara a fait sa demande de nationalité française. A 20 ans, il était encore mineur aux yeux de la législation de l’époque, la majorité étant fixée alors à 21ans. C'est cette "avance" d'une année que lui reprochent aujourd'hui les autorités françaises. Le dossier traîne donc depuis 2012 mais il est arrivé à un point de non-retour puisque Sikhou Camara ne peut plus faire renouveler son passeport qui expirera définitivement dans deux mois, le privant de tous déplacements.
Le drame de toute une famille. Autre conséquence de cet imbroglio juridique, les enfants et petits-enfants de Sikhou Camara se retrouvent eux aussi dépossédés de leur nationalité. Bakary Camara, le fils de Sikhou, s'en est ému dans une lettre ouverte publiée sur le site Mediapart. "Je ne demande ni plus ni moins que le respect de la parole donnée et de l’écrit délivré par une autorité administrative de mon pays il y a 46 ans, afin que le droit soit enfin dit dans l’affaire CAMARA qui n’a que trop perduré", écrit-il.