Il s’agit de la plus importante saisie de cocaïne à ce jour en métropole. Un cargo contenant 2,3 tonnes de cocaïne a été intercepté le 10 décembre par les douanes françaises, au large de Boulogne-sur-Mer. Les 12 membres de l'équipage du cargo Carib Palm ont été présentés mardi après-midi à un juge d'instruction de la Juridiction interrégionale spécialisée de Lille (Jirs). Les enquêteurs ont livré des détails sur la façon dont ils ont opéré pour réaliser cette saisie historique.
Une trajectoire suspecte. Lorsque le cargo est entré dans la Manche, les douaniers maritimes l’avaient déjà repéré comme un navire suspect. Revendu récemment, ce vieux bateau à la limite de l’épave flottante naviguait sous pavillon moldave, en provenance d’une zone géographique sensible, le Venezuela. Il naviguait officiellement à vide vers l’Europe. Autre élément suspect : le bateau avait emprunté une route peu cohérente avec celles du commerce traditionnel.
Il constituait alors une cible privilégiée pour les gardes côtes des douanes dirigées par Jean Philippe Vigot. "Lorsque l’on croise un certain nombre de données, quand on voit l’état du bateau, quand on voit qu’il voyage à vide, on s’interroge. Et il y avait d’autres paramètres : une provenance d’Amérique du Sud, une destination déclarée sur l’Europe du Nord. Ca nous permet d’affiner les suspicions et de déterminer une cible potentielle", explique-t-il au micro d’Europe 1.
"Un coup dur porté aux organisations". Ce travail d’analyse va se révéler payant. Dérouté sur Boulogne-sur-Mer, le cargo est fouillé pendant neuf heures par une vingtaine d'agents. Dans la salle des machines, les enquêteurs découvrent "une paroi illogique au regard des plans", selon les explication de Romuald Muller, le directeur de la PJ lilloise. Derrière la cloison : 80 ballots de cocaïne, pour un poids de 2,3 tonnes de cocaïne pure à 70%.
Sur le marché clandestin, cette quantité représente bien plus après coupage, précise le patron de la PJ de Lille. "On a une saisie de 2,3 tonnes, avec un taux de pureté important, ce qui fait que, dans la rue, cette marchandise représente à peu près dix tonnes. Ce n’est pas anodin. De plus, on saisit également un bateau. On démantèle également une équipe de marins. C’est un coup dur porté aux organisations", insiste-t-il au micro d’Europe 1.
L’organisation de narcotrafiquants a perdu l’équivalent de près de 500 millions d’euros. "La production mondiale annuelle de cocaïne est de 800 tonnes. Le ‘besoin’ européen est de 300 tonnes", poursuit Romuald Muller. Et d’ajouter : "lorsqu'on saisit 2,3 tonnes, on leur fait mal car on leur prend leur drogue, mais aussi leur navire, leur équipage et on empêche le produit d'arriver dans la rue."
L’organisateur du réseau reste à identifier. Le capitaine géorgien, son second, turc, et les dix hommes d'équipage ukrainiens ont été placés en garde à vue, avant d'être présentés devant le juge d'instruction mardi, en vue d'être mis en examen. Le parquet a requis le placement en détention provisoire, a précisé le procureur adjoint de Lille, Bruno Dieudonné. Pour la police, il s'agira désormais de "démanteler la filière et de trouver les organisateurs du trafic", a conclu Romuald Muller.