Brétigny : la SNCF se dit victime d'une "anomalie métallurgique"

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GM avec Noémie Schulz , modifié à
Dans un courrier envoyé au juge d'instruction, la SNCF pointe également du doigt un "raisonnement incomplet" dans le dernier rapport judiciaire.

Sept morts et des dizaines de blessés. Plus de deux ans après les faits, l'accident de Brétigny est toujours au cœur d'une bataille judiciaire. Si un consensus semblait se dégager autour d'un défaut de maintenance sur les rails, la SNCF soulève désormais une autre hypothèse et met en cause la qualité du dernier rapport des experts judiciaires.

"Raisonnement incomplet". Dans un courrier envoyé par son avocat au juge d'instruction, la société publique pointe un "raisonnement incomplet", "des erreurs" ainsi qu'un scénario qui repose sur des "hypothèses inexactes et des explications inabouties ou contestables". 

"Anomalie métallurgique". La SNCF se dit en outre victime d'une "anomalie métallurgique". En effet, s'il semblait acquis que l'accident, dû à une fissure sur l'éclisse d'un aiguillage, avait été provoqué par un défaut de maintenance et un agrandissement au fil des ans de la fissure, la SNCF met en avant une autre version. Selon elle, la fissuration aurait été très rapide à cause du matériau utilisé pour cette pièce. Ce "défaut" aurait donc fait du déraillement un événement inédit, imprévisible et exceptionnel.

"Choquant" pour les victimes. La version de la SNCF est cependant très loin de convaincre les familles de victimes qui se disent révoltées. Pour le président de l'association des victimes d'accident collectif (Fenvac), Stéphane Gicquel, il "est extrêmement choquant pour les victimes de revenir sur des choses qui étaient acquises" et d'y voir une "manœuvre vraiment grossière de la part de la SNCF". Pour lui, "la stratégie de la SNCF est de semer le doute et d’obtenir une relaxe au bénéfice de ce doute". Contactée par Europe 1, la SNCF n'a pas souhaité réagir.

La "duplicité" de la SNCF. Pour Gérard Chemla, avocat de l’association Entraide et défense des victimes de la catastrophe de Brétigny, le nouveau scénario avancé par la SNCF "ne fait que renforcer la sensation de la duplicité de la compagnie nationale". Il rappelle que "la pièce qui a cédé était en place depuis 7 ans alors que la pratique était de la remplacer tous les deux ans et demi tant elle était exposée à un vieillissement prématuré". "Un tel laxisme ne pouvait aboutir qu’à sa rupture", explique-t-il dans un communiqué. L'avocat soutient que "les victimes de cette catastrophe iront au bout de leur démarche", notamment en soutenant vendredi une "demande de provision" devant le juge d'Evry.