Chantage présumé au roi du Maroc : "Mais bien sûr, je vais publier" le livre

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C.P.-R. , modifié à
Le journaliste et sa consœur Catherine Graciet sont suspectés d’avoir accepté la non-publication d’un livre à charge contre le souverain du Maroc en échange de trois millions d’euros. Mais Eric Laurent a assuré sur Europe 1 que l'ouvrage sortirait.
INTERVIEW

Il avait "des raisons personnelles". Invité d’Europe 1 Midi, le journaliste Eric Laurent est soupçonné avec Catherine Graciet, d’avoir accepté de ne pas publier un ouvrage critique envers la famille royale marocaine en contrepartie de trois millions d’euros. Mis en examen pour "chantage" et "extorsion de fonds", il s’est expliqué sur son geste, lundi midi, sur Europe 1.

"Des raisons personnelles" d’accepter. "J’avais des raisons précises d’accepter. Des raisons personnelles", a avancé le journaliste dont la femme "est extrêmement malade, atteinte d'un cancer généralisé". "Il faut des soins à l’étranger et j’y ai vu une bonne opportunité", s’est justifié celui qui a été pris en flagrant délit, avec sa consœur, en train d’accepter une avance de 40.000 euros d’un émissaire du Maroc, jeudi dernier, dans un hôtel de luxe. Ils auraient assuré, en échange, sur une lettre qu'a pu se fournir le JDD, "ne plus rien écrire sur le royaume du Maroc". 

"Nous avons été lynchés". "Encore une fois, nous n’avons pas demandé cette somme", a-t-il insisté. "Je n’ai jamais tenu le moindre propos concernant un éventuel chantage. Il n’y a pas eu de pressions de ma part", a-t-il répété maintes fois, dénonçant au passage "le lynchage médiatique" dont il estime avoir été victime avec sa consœur, de la part de la presse "téléguidée par Dupond-Moretti (l’avocat du royaume chérifien, ndlr)".

"La proposition n’a pas été faite par moi". "Soyons très clairs, la proposition n’a pas été faite par moi. Les écoutes téléphoniques le montrent", a-t-il ajouté faisant référence aux enregistrements effectués par l’avocat du roi du Maroc lors des entrevues avec les journalistes. Ces écoutes n’ont pas été transmises dans leur totalité aux policiers. "J’ai le droit de faire ce que je veux de mon travail, de publier le livre ou de le mettre sous le boisseau", s’est défendu le journaliste, avançant que c’était "une transaction privée".

Laurent, "l’homme à abattre" ? "Mais bien sûr, je vais le publier", a assuré le journaliste à plusieurs reprises, dont la collègue est, selon lui, "tout à fait d’accord". Toutefois, en milieu de journée, peu après l'interview sur Europe 1, le Seuil, l'éditeur qui devait publier l’ouvrage, a annoncé avoir renoncé à le faire. "La relation de confiance" entre l'éditeur et les auteurs est "de facto dissoute". "Dans ces conditions, la publication envisagée ne saurait avoir lieu", indique notamment la maison d'édition dans un communiqué.

Ouvrage sensible, "preuves à l'appui". Selon Eric Laurent, l’ouvrage dévoile des éléments sensibles, "preuves à l’appui", sur l’entourage du roi du Maroc, en particulier sur "les problèmes de succession autour de Hassan II" et son patrimoine. Et de lancer : "Dallas, à côté, c’est une bluette". "On nous a tendu un traquenard. […] J’étais l’homme à abattre. Car en plus, je connais très bien les coulisses du pouvoir marocain", a encore argumenté Eric Laurent qui avait déjà publié avec sa consœur un essai à charge contre le royaume chérifien, il y a deux ans, intitulé "Le roi prédateur" et interdit au Maroc.