L’Etat n’est pas prêt de récupérer ses 404 millions d’euros. Condamné à rembourser cette somme perçue en 2008 pour solder son contentieux avec le Crédit Lyonnais sur la revente d’Adidas, Bernard Tapie a pris des mesures judiciaires lui permettant de se mettre à l’abri des huissiers, du moins pour quelques mois. Avant d’être condamné par la cour d’appel de Paris, l’homme d’affaires a ouvert une procédure de sauvegarde, auprès du tribunal administratif de Paris, rapporte Le Monde. Une démarche entraînant, temporairement, la suspension des poursuites individuelles.
Quelques jours avant la condamnation, sa demande est acceptée. Bernard Tapie a visiblement senti le vent tourner. Anticipant la décision défavorable des magistrats de la cour d’appel, l’homme d’affaires a demandé l’ouverture d’une "procédure de sauvegarde", visant ses deux sociétés, pour lesquelles il a organisé ses activités et son patrimoine. Le 30 novembre, le tribunal de commerce de Paris a accédé à la demande de l’homme d’affaires concernant le Groupe Bernard Tapie (GBT), actionnaire majoritaire du journal "La Provence". Puis, mercredi 2 décembre, la veille la condamnation, il a prononcé l'extension de cette procédure à la Financière et immobilière Bernard Tapie (FIBT).
Une mesure de protection pour ses sociétés. Selon les spécialistes, il s’agit d’une mesure de protection pour une société, qui sait qu'elle risque d'être en grande difficulté financière. "La procédure de sauvegarde est réservée aux entreprises (...) qui rencontrent des difficultés qu'elles ne peuvent surmonter et qui sont de nature à les conduire à la cessation de leurs paiements", peut-on lire sur le site du tribunal de commerce de Paris.
Une procédure qui ne peut excéder 18 mois. Lorsqu’il accède à une demande de procédure de sauvegarde, le tribunal fixe une période de six mois renouvelable pendant lesquels les dettes sont gelées, et les créanciers doivent attendre. Le jugement d'ouverture entraîne en effet la suspension des poursuites individuelles et arrête le cours des intérêts légaux et les majorations. Selon l’article L. 620-1 du Code de commerce : "cette procédure est destinée à faciliter la réorganisation de l’entreprise afin de permettre la poursuite de l’activité économique, le maintien de l’emploi et l’apurement du passif".
En contrepartie, pendant ces six mois, le patron de la société doit fournir des gages, c’est-à-dire des preuves que tout est mis en œuvre pour remettre son entreprise à flot. Cette procédure ne peut pas excéder 18 mois.
"Pas une manière de fuir". Bernard Tapie se défend de tenter d’échapper à sa condamnation avec cette procédure. "Ce n'est pas une manière de fuir ou d'organiser mon insolvabilité", assure-t-il au Monde. Et de préciser : "1.500 emplois dépendent de moi, dans le cadre de ma participation de 20 millions d'euros au capital de La Provence. Pas question qu'ils soient en péril. Tous mes actifs sont maintenant sous la surveillance de la justice, qui peut aisément vérifier que je n'ai aucun compte caché offshore. C'était la seule manière pour moi de dormir tranquille, tout comme mes créanciers, d'ailleurs".
Bernard Tapie a donc confié ses actifs à un administrateur judiciaire. "Le tribunal sait tout de mes actifs. J'ai tout mis sur la table", insiste-t-il. Selon Me Patrick Philip, un avocat fiscaliste du camp Tapie, des 345 millions d’euros accordés en 2008 par un tribunal arbitral, il ne reste plus que 101,5 millions. Le reste de l’argent ayant servi à payer les impôts et les dettes de l’homme d’affaires. Sur la somme restante, 97 millions ont été saisis par les juges en charge de l’enquête pénale sur l’arbitrage. Outre l’argent reversé dans les entreprises de Bernard Tapie, une somme de 45 millions d’euros a été versée au couple, au titre du préjudice moral. La moitié a été réinvestie dans La Provence et le reste dans diverses propriétés, indique Le Monde. Pour l’heure, Bernard Tapie n’a donc plus d’argent, mais il a gagné du temps.