Vous vous rappelez peut-être de l'immense silhouette de Thierry Dol, apparue sur le tarmac de Villacoublay le 30 octobre 2013. Libéré en même temps que trois autres otages après 1.139 jours aux mains d'Aqmi, il avait été enlevé le 16 septembre 2010 sur le site minier d'Areva, à Arlit au Niger. Un peu plus de deux ans après sa libération, le Martiniquais a décidé de parler. Dans une interview accordée au Parisien, Thierry Dol livre des précisions sur ses conditions de captivité, sa tentative d'évasion des mains de ses geôliers, ainsi que les conditions de sa libération. Et il annonce son intention de porter plainte contre l'Etat.
Deux plaintes déposées. C'est un Thierry Dol très remonté qui s'exprime dans Le Parisien. Par l'intermédiaire de son avocat, Maître Alex Ursulet, Thierry Dol a déposé deux plaintes. La première pour "mise en danger de la vie d'autrui" vise Areva, son ancienne entreprise pour laquelle il travaillait lorsqu'il a été enlevé. Et la seconde pour "non-assistance à personne en danger" vise l'Etat français. Deux plaintes qui viennent compléter l'enquête antiterroriste toujours en cours.
"J'étais persuadé qu'Areva allait nous évacuer". Dans son interview, Thierry Dol revient sur les raisons qui l'ont poussé à partir au Niger et sur ces conditions de travail là bas. Thierry Dol habitait à Arlit depuis 2008, après avoir eu envie de s'expatrier. La sécurité du site où il travaillait était assuré par une société privée en raison des combats qui opposaient la rébellion touareg au pouvoir nigérien. Mais selon l'ex-otage, les conditions de sécurité ont basculé en juillet 2010 au moment où l'otage Michel Germaneau a été tué. Selon lui, Areva avait conscience de la menace qui pesait sur ses salariés. "Une note de l'entreprise, reçue à l'été 2010, nous incitait à d'avantage de prudence, preuve que la société n'ignorait pas ces risques", affirme-t-il en effet. Pour autant aucune mesure de sécurité supplémentaire n'est prise et quatre salariés, dont Thierry Dol, sont enlevés en septembre.
Trois années de captivité. S'en suivent trois années de captivité aux mains d'Al-Qaïda au Maghreb Islamique. "Nous étions la plupart du temps attachés, les yeux bandés, vivant et dormant à même le sol", décrit Thierry Dol. Des conditions de vie qui l'ont donc poussé à essayer de s'évader en février 2012, en compagnie de Daniel Larribe, un autre otage. Une tentative échouée après 30 kilomètres de marche pendant deux jours car les deux Français se sont fait dénoncer par le fils d'un chamelier, rencontré sur le chemin.
Une libération encore floue. Les conditions de détention de Thierry Dol et de Daniel Larribe se dégradent après leur tentative d'évasion, "nous sommes passés du statut d'esclave à celui d'animal" explique l'ex-otage. Mais il aura encore fallu attendre un an et demi avant d'être libéré par l'Etat français, le 30 octobre 2013. Ce jour là, Thierry Dol apparait grand sourire aux lèvres sur le tarmac de Villacoublay, entouré des trois autres Français retenus par Aqmi. "Aujourd'hui, j'ignore encore s'il y a eu rançon, si oui combien, les intermédiaires éventuels", détaille Thierry Dol avant d'ajouter, 'j'ai besoin de savoir". C'est d'ailleurs pour cela qu'il a déposé ses deux plaintes, afin de faire la lumière sur ce qu'il s'est passé. Un moyen également pour lui d'obtenir gain de cause dans les indemnisations d'ex-otage qu'il réclame et également car, comme il l'explique, il souhaite "avoir le droit de se reconstruire".