Jonathann Daval, soupçonné du meurtre de sa femme Alexia, est interrogé jeudi par le juge d'instruction du tribunal de Besançon chargé du dossier, sur fond de tensions croissantes avec sa belle-famille, partie civile. Il s'agira de son premier interrogatoire depuis celui du 27 juin qui l'avait vu revenir sur ses aveux et accuser son beau-frère, Grégory Gay, d'être le meurtrier d'Alexia.
Deux confrontations début décembre. Jonathann Daval, 34 ans, doit être interrogé à partir de 10h, en présence de ses avocats, au tribunal de Besançon, venant de la maison d'arrêt de Dijon où il est incarcéré depuis sa mise en examen pour "meurtre sur conjoint". Le 7 décembre, il sera de retour à Besançon pour deux confrontations distinctes, avec la soeur d'Alexia et son mari, Stéphanie et Grégory Gay, puis avec les parents de la victime, Isabelle et Jean-Pierre Fouillot. Tous parties civiles, ils avaient réclamé ces confrontations après avoir été mis en cause par Jonathann Daval.
Signe de la tension ambiante: mercredi, la mère du suspect numéro un a nié toute "complicité" dans le meurtre de sa belle-fille. Un cheveu de Martine Henry a été retrouvé dans le coffre du véhicule professionnel de Jonathann qui aurait servi à transporter le corps d'Alexia, élément relevé par Grégory Gay qui souhaite une enquête approfondie sur ce point.
L'avocat de Jonathann Daval en colère. Interrogé par Europe 1, Randall Schwerdorffer, l'avocat de Jonathann Daval, a dénoncé cette requête. "C'est juste malveillant, pour déstabiliser mon client à quelques heures de son audition" a-t-il déclaré. "Communiquer sur l'ADN de sa mère vise à exercer une pression sur lui, d'autant plus qu'on sait que Jonathann est très attaché à sa maman, qui est un pilier dans sa vie à la maison d'arrêt", à préciser l'avocat. "A ma connaissance, ce monsieur est partie civile, a-t-il rappelé au sujet de Grégory Gay. Qu'il ne se comporte pas comme un contre-enquêteur".
Depuis un an, rebondissements et zones d'ombre alimentent la chronique de ce qui aurait pu être l'histoire tristement courante d'une femme tuée par son conjoint, comme 130 autres en France l'an dernier. Tout commence le 28 octobre 2017 quand Jonathann Daval signale à la gendarmerie de Gray-la-Ville (Haute-Saône) la "disparition" de son épouse, une employée de banque de 29 ans qui, dit-il, n'est pas rentrée de son jogging. En pleine affaire Weinstein, au moment où l'opinion publique s'alarme des violences faites aux femmes, la France découvre le visage de ce petit brun frêle semblant perdu sans son épouse. De battues en marche blanche, d'une course en mémoire d'Alexia à l'enterrement de la jeune femme - dont le corps sera retrouvé deux jours plus tard dans une forêt -, l'homme affiche sa peine, larmes aux yeux et voix tremblante.
Deux revirements en six mois. Fin janvier, premier revirement: Jonathann Daval est mis en examen face aux "éléments accablants" découverts, comme l'utilisation de sa voiture en pleine nuit et d'un drap appartenant au couple pour envelopper le corps. A l'issue de sa garde à vue, le jeune informaticien avoue avoir étranglé sa femme au cours d'une dispute à leur domicile au retour d'un dîner chez ses beaux-parents, parlant d'un "accident". Fin juin, c'est aussi une crise de colère d'Alexia que Jonathann Daval évoque devant le juge d'instruction, au prix d'un revirement spectaculaire: son beau-frère, Grégory Gay, aurait étranglé Alexia pendant le dîner. Tous auraient ensuite conclu "un pacte secret" pour dissimuler les faits.
Des questions non résolues. Les zones d'ombre restent nombreuses : qui a déplacé son cadavre ? Une bombe aérosol retrouvée chez le couple a-t-elle servi à brûler le corps ? Qui était dans la voiture de Jonathann au retour du dîner chez ses beaux-parents ? Quelle est la signification d'un document Word retrouvé sur l'ordinateur de l'informaticien, déroulant point par point le scénario de la matinée de la "disparition", comme un pense-bête à réciter aux enquêteurs ? Devant la cour d'appel, Jonathann Daval s'était exprimé par visioconférence depuis la maison d'arrêt, sans croiser le regard des parents d'Alexia, de sa soeur et de son beau-frère. Ce qu'il fera dans une semaine.