Mort d’Aurélie Fouquet : Redoine Faïd, le "repenti" médiatique

La fiche Intepol de Redoine Faïd en 2013.
La fiche Intepol de Redoine Faïd en 2013. © INTERPOL / AFP
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Neuf hommes doivent être jugés par la cour d'assises de Paris, dont un braqueur médiatique, Redoine Faïd, lors d'un procès-fleuve de 33 jours.

Il a toujours nié toute implication dans le projet de braquage qui a coûté la vie à Aurélie Fouquet, la première policière municipale morte dans l’exercice de ses fonctions, en avril 2010. Redoine Faïd est jugé, ainsi que huit autres prévenus, à partir de mardi, par la cour d’assises de Paris, pour son implication dans ce fait divers sanglant qui avait eu un fort retentissement politique. Considéré comme le possible chef de cette bande armée, le braqueur Redoine Faïd, 43 ans, ne sera pas jugé pour meurtre mais pour "tentative de vol en bande organisée avec usage ou menace d'armes en état de récidive". Le braqueur multirécidiviste n'en risque pas moins, lui aussi, la réclusion criminelle à perpétuité.

Trois braquages dans les années 1990. Il est l’une des figures de proue du banditisme français, celle des "braqueurs des cités", désormais trentenaires et quadragénaires, gavés de films d'action américains, lourdement armés, aux méthodes parfois spectaculaires. Dans les années 1990, Redoine Faïd est à l’origine de trois vols à main armée : la BNP de Creil en 1995 avec prise d'otage, une société informatique d'Evry en 1996 et un fourgon blindé à Villepinte en 1997. Il a ensuite été en fuite pendant trois ans, notamment en Suisse et en Israël, avant d’être arrêté fin 1998 et condamné à trente et un ans de réclusion. Il restera dix ans derrière les barreaux.

"Mes démons ne sont pas endormis, ils sont bien morts". Bénéficiant d’une libération conditionnelle en 2009, le grand public l’a découvert un an plus tard, grâce à un livre d'entretiens avec le journaliste Jérôme Pierrat, "Braqueur, des cités au grand banditisme", où l'homme affirmait que son passé de délinquant était derrière lui. Son histoire ? Celle d'un petit délinquant des cités, à Creil, devenu une étoile montante du grand banditisme et du braquage dans les années 90. Sa spécialité ? Les attaques de fourgons blindés. Dans son livre, il raconte notamment comment le cinéma, et surtout les films du réalisateur Michael Mann, dont Heat avec Robert de Niro, l'ont inspiré pour mettre au point ses attaques.

" Mes démons ne sont pas endormis, ils sont bien morts, parce qu'il y a tout un travail, toute une prise de conscience "

 

Redoine Faïd jurait surtout qu'il avait tourné la page. "10 ans derrière les barreaux, ça suffit", disait-il en parlant de la prison comme d'"une vie de merde". Un discours qu’il recrachait sur les plateaux de télévision où il présentait son allure bien mise, sa belle gueule, et sa barbe de trois jours. D’un ton assuré et d’un air affable, Redoine Faïd vendait à qui voulait l’entendre son discours captieux d’ex-caïd repenti. "Mes démons ne sont pas endormis, ils sont bien morts, parce qu'il y a tout un travail, toute une prise de conscience", confiait-il sur Europe 1.

Soupçonné d’être l’instigateur du projet de braquage. Sauf qu’à cette même période, Redoine Faïd est suspecté d’avoir orchestré la tentative de braquage qui a coûté la vie à Aurélie Fouquet. Le plan, dont l'objectif était de braquer un fourgon blindé, déraille le 20 mai 2010, vers 9h15, à Créteil, près de Paris. Des policiers repèrent une camionnette blanche, dont la carrosserie porte deux trous ressemblant à des impacts de balles. Pris en chasse, le véhicule fonce sur l'autoroute A4, ses occupants tirent sur les policiers qui les suivent - "pour tuer du flic", affirmeront ces derniers. Des automobilistes sont blessés.

Arrivés à Villiers-sur-Marne, après une dizaine de kilomètres de course-poursuite, les hommes cagoulés, gantés, vêtus de treillis sombres et équipés de gilets pare-balles, abandonnent et incendient le premier véhicule, en braquent un autre. Arrive alors une voiture de police municipale, qui essuie une vingtaine de tirs : une "véritable exécution", selon une source proche de l'enquête. Les deux policiers à bord sont blessés : Thierry Moreau au thorax, et Aurélie Fouquet à la tête. Cette mère d'un tout jeune enfant décédera quelques heures plus tard. Les malfaiteurs braquent un troisième véhicule et s'enfuient.

Arrêté avec des billets d’un braquage. Les policiers, qui n'ont jamais vraiment cru que le "braqueur repenti" avait coupé les ponts avec le "milieu", s’intéressent alors de près à Redoine Faïd. Ils ont notamment eu la puce à l’oreille en voyant Redoine Faïd dans un documentaire de Canal+ sur les nouveaux caïds des cités. Un reportage où les policiers ont reconnu après coup une arme, une voiture et des suspects liés à la fusillade de Villiers-sur-Marne. Après avoir échappé de justesse en janvier 2011 à un premier coup de filet, Redoine Faïd est arrêté six mois plus tard à Lille, les poches remplies de billets provenant d'un braquage.

La maison d'arrêt de Sequedin

Une spectaculaire évasion. Incarcéré à la prison de Sequedin, il est alors classé comme DPS, un "détenu particulièrement signalé". Un signalement qui ne l’empêche pas de s’enfuir, deux après son incarcération, le 13 avril 2013. Une évasion spectaculaire, préparée durant de longs mois, au cours de laquelle il fait sauter cinq portes blindées avec de l’explosif, prenant dans sa fuite quatre surveillants pénitentiaires en otage. Après un mois et demi de cavale, il est arrêté dans un hôtel de Seine-et-Marne, où il résidait depuis plusieurs jours avec un complice.

Depuis, Redoine Faïd est incarcéré à l’isolement, à la maison d’arrêt de Fleury-Merogis. Il sera donc l’un des prévenus clé du procès-fleuve qui doit durer 33 jours.