Abandon d'un projet de livre contenant des informations supposées gênantes en échange de deux millions d'euros. Deux journalistes français soupçonnés d'avoir fait chanter le royaume du Maroc ont été mis en examen à Paris mais l'un d'eux a contesté toute extorsion samedi. Éric Laurent et Catherine Graciet sont poursuivis pour "chantage" et "extorsion de fonds", selon la même source. Ils ont été laissés libres, mais leur contrôle judiciaire leur impose notamment de ne pas entrer en contact entre eux ni avec d'autres protagonistes du dossier.
Un livre dont la sortie était prévue en d'année. L'affaire a débuté le 23 juillet quand Eric Laurent a contacté une première fois le cabinet royal marocain en indiquant qu'il préparait un livre, selon le récit de l'avocat du Maroc, Me Eric Dupond-Moretti. Une première rencontre est organisée à Paris avec un représentant du Maroc à qui "Eric Laurent dit 'écoutez, moyennant 3 millions d'euros, je ne publie pas mon livre, un livre que je prépare avec Catherine Graciet'", a raconté l'avocat. "Rien dans le dossier n'établit (...) que l'un ou l'autre des journalistes aurait initié une discussion de nature financière et pas plus n'aurait exigé un paiement en contrepartie de la renonciation à publier le livre", a contesté le défenseur du journaliste.
Un contrat signé avec le roi du Maroc. Après le premier rendez-vous, le Maroc a porté plainte et une enquête a été diligentée par le parquet de Paris, qui a ouvert mercredi une information judiciaire. Dans ce cadre, des réunions ont été organisées, "des rencontres filmées, enregistrées, entre le représentant du roi" et les journalistes, selon Me Dupond-Moretti. Selon l'avocat du Maroc, au cours de ces réunions, les journalistes auraient accepté de transiger à deux millions d'euros et sont sortis du dernier rendez-vous, jeudi", avec "un acompte substantiel de 40.000 euros chacun".
Me Dupond-Moretti a évoqué l'existence d'un "contrat signé" par les deux journalistes. Sur cette lettre manuscrite, dévoilée par BFM, ils écrivent notamment qu'ils "n'écriront plus rien sur le royaume du Maroc". En contrepartie, "nous confirmons avoir reçu à ce jour une avance de 80.000 euros", ajoutent-ils.
Un "piège" ? Les deux journalistes ont été interpellés jeudi à Paris et placés en garde à vue à la sortie d'un rendez-vous avec un représentant du Maroc au cours duquel "il y a eu remise et acceptation d'une somme d'argent", a indiqué une source proche du dossier. Vendredi, l'avocat de Catherine Graciet, Me Éric Moutet a aussi concédé un "deal financier", tout en évoquant "un piège".
Via son avocat William Bourdon, Eric Laurent a contesté samedi toute infraction. Certes, il a bien cherché un "accord financier" avec le Maroc autour de son livre, mais sans chantage. Il a au contraire dénoncé un "traquenard" et une "manipulation" de Rabat, assurant qu'il réclamera un non-lieu.