L'enquête avance à grands pas sur l'attentat commis vendredi en Isère à l'usine Air Products. Selon le procureur de la République de Paris, l'action de Yassin Salhi, le principal suspect, "correspond très exactement aux mots d'ordre de Daesh". Une information judiciaire contre Yassin Salhi pour assassinat en lien avec une entreprise terroriste a été ouverte. Le parquet a requis le placement en détention provisoire du suspect, après sa présentation mardi à un juge d'instruction en vue d'une mise en examen.
"Une opération martyr". D'après le procureur de Paris, François Molins, la mise en scène de la décapitation et l'envoi de photos pour une éventuelle revendication correspondent aux mots d'ordre de l'organisation Etat islamique. La tentative de faire exploser l'usine chimique "ressemble à une opération martyr", estime-t-il encore. Le caractère terroriste de l'attaque est donc avéré, en dépit de la défense de Yassin Salhi. L'homme revendique lui "des considérations personnelles", notamment "un conflit avec son employeur". Mais pour François Molins, "l'un n'exclut pas l'autre".
"L'autorisation de diffuser les photos". Les enquêteurs ont aussi considérablement avancé sur les liens du suspect avec Yunes-Sébastien, le destinataire des deux photos macabres avec la tête de la victime. Selon le procureur, les deux hommes "étaient régulièrement en contact". Des perquisitions chez les proches de Yunes-Sébastien, parti en Syrie avec sa famille en novembre 2014, ont en outre permis de mettre la main sur un téléphone. Ce téléphone a révélé une conversation via une messagerie instantanée et datant de vendredi entre Yunes-Sébastien et sa famille. Le jeune homme affirme être "une des causes pour lesquelles il a fait ça". "Il dit aussi avoir reçu les deux clichés", poursuit le procureur, "et avoir demandé l'autorisation à l'organisation Etat islamique de les diffuser.
Le parcours de Yassin Salhi. Les enquêteurs ont aussi retracé en détail le parcours de Yassin Salhi. "Il était connu des services de police pour sa radicalisation et sa fréquentation du milieu islamiste radical", a affirmé François Molins. Repéré dès 2003 "comme gravitant dans un milieu salafiste, dans le Doubs, à Pontarlier", Yassin Salhi avait fait l'objet d'une fiche S entre 2006 et 2008. Il serait aussi parti un an en Syrie en 2009 avec sa famille.
A son retour, il se met à la pratique de plusieurs sports de combat dont du "free fight". "L'audition des gérants de la salle de sport locale a révélé une personnalité parfois sujette à de violentes montées de colère", explique le procureur. "Un de ses entraîneurs a également fait état d'une école coranique que Yassin Salhi lui aurait dit avoir intégré lors de son séjour en Syrie", ajoute-t-il. Au printemps 2014, la police entend à nouveau parler de Yassin Salhi puisque "l'un de ses voisins avait signalé à la gendarmerie la tenue de réunions à caractère religieux à son domicile". Enfin, des SMS envoyés à son épouse ainsi que des conversations via Whatsapp "révèlent qu'il se plaint du manque d'implication religieux" de sa femme, conclut le procureur.