Cette baleine s'est-elle simplement égarée, ou nage-t-elle pour le compte de la Russie ? Depuis quelques jours, des soupçons pèsent sur un béluga retrouvé non loin des côtes norvégiennes. Les experts de la marine nationale craignent en effet que le mammifère ne fasse partie d'un programme militaire un peu spécial déclenché par le Kremlin.
Tout a commencé le 25 avril, lorsque des pêcheurs au large de l'île d'Ingøya, dans le comté de Finnmark, au nord de la Norvège, on repéré le béluga. Tout de suite, ils notent l'attitude étrange de l'animal qui semble n'avoir aucune peur de l'homme, alors que l'espèce est réputée craintive. Sur les vidéos prises en mer, le mammifère dresse la tête hors de l'eau, se laisse caresser le nez et semble savoir comment évoluer entre les bateaux.
Plus troublant encore, il attaque les cordes qui pendent le long des embarcations. Joar Horsten, l’un des pêcheurs présents ce jour-là, a décrit la scène à NRK, un groupe de chaînes de télévision norvégiennes : "Nous allions mettre des filets lorsque nous avons vu un béluga nager entre les bateaux. Il est venu vers nous et, quand il s'est approché, nous avons vu qu'il portait une sorte de harnais", a-t-il expliqué.
"Ce ne sont pas des scientifiques mais la marine russe qui a fait ça"
C'est ce harnais qui va mettre la puce à l'oreille des pêcheurs, puis des experts de la marine norvégienne. Sur les sangles en effet, une inscription : "Equipment of St. Petersburg" ("équipement de Saint-Pétersbourg"). Et le matériel semble pouvoir être utilisé pour y attacher des appareils de prise de vue ou des armes, comme des fusils. "Si cette baleine vient de Russie, et il y a de bonnes raisons de le croire, alors ce ne sont pas des scientifiques russes, mais la marine qui a fait ça", a déclaré Martin Biuw de l'Institut de recherche marine du Norvège, cité par le Guardian.
De fait, les chercheurs civils russes démentent tout lien avec l'animal. Le béluga ferait donc plus probablement partie d'un programme militaire. Ce qui n'a rien de nouveau : dès les années 1960, Soviétiques et Américains entraînaient des phoques et des dauphins à la pose ou la détection de mines sous-marines, ainsi qu'au transport de torpille. Discrets, ces animaux ont aussi l'avantage d'avoir une vue aiguisée et une excellente mémoire.
Un programme relancé par Poutine
Il y a trois ans, Vladimir Poutine a relancé les recherches sur l'utilisation de mammifères marins comme auxiliaires de guerre. En 2016, le ministère de la Défense russe a acquis cinq dauphins auprès d'un delphinarium russe, et une base de recherche a été rouverte dans la région de Mourmansk, à quelques encablures de la frontière norvégienne. À l’essai, les dauphins achetés donc, des phoques... et des bélugas.
Dans les années 1990, officiellement, les résultats des essais conduits sur les mammifères marins étaient insuffisants pour faire entrer les animaux en service opérationnel. Près de trente ans plus tard, les militaires russes retentent peut-être leur chance.