Noces d’or. Le 22 janvier, le couple franco-allemand aura officiellement 50 ans. La formation du "moteur de l’Europe" a été matérialisée par la signature du Traité de l’Elysée entre le général de Gaulle et le chancelier allemand Konrad Adenauer, dirigeants d’alors des deux ex-"ennemis héréditaires".
Pour fêter ces noces d’or, François Hollande se rend lundi et mardi à Berlin, à l’invitation d’Angela Merkel.
Une célébration clinquante… Selon le site officiel de l’événement, des centaines de manifestations sont prévues pendant ces deux jours comme une bonne partie de l’année, en France, en Allemagne, mais aussi dans d’autres pays comme par exemple la Chine, au lycée franco-allemand de Pékin, relève Challenges. C’est aussi dans ce cadre que les équipes de France et d’Allemagne de football vont s’affronter le 6 février prochain au Stade de France.
Côté protocolaire, les gouvernements français et allemands se réuniront en Conseil des ministres à la chancellerie et les députés du Bundestag et de l'Assemblée nationale débattront pendant deux heures au Reichstag (photo), avant d'assister à un concert à la Philharmonie de Berlin. Nul doute que tous ces élus auront à cœur d’afficher une concorde de circonstance. Et pourtant...
…Mais dans un contexte tendu. Reste que l’ambiance n’est pas au beau fixe entre les deux partenaires, principaux architectes de la construction européenne. La crise de la zone euro a jeté un certain froid. Et l’arrivée l'an passé du socialiste François Hollande à l'Elysée, alors que la conservatrice Angela Merkel avait publiquement soutenu son rival Nicolas Sarkozy a encore rafraîchi la relation entre les deux poids lourds européens.
Sur la crise de l'euro, Paris et Berlin se sont affrontés sur quasiment tous les dossiers, même s'ils sont parvenus à des compromis. Et la discrétion de l’Allemagne depuis l’intervention française au Mali est un symptôme autant qu’un facteur supplémentaire de ces relations distendues.
Des réalisations concrètes… Et pourtant, en cinquante ans, France et Allemagne ont tissé des liens étroits, peut-être comme aucune autre relation bilatérale. Nulle part ailleurs dans le monde un tel binôme d'Etats ne dispose en effet de structures communes aussi denses et variées. Citons, parmi beaucoup d’autres, des instances méconnues tels que le Conseil Franco-allemand de Défense et de Sécurité (CFADS), le Conseil Economique et Financier franco-allemand (CEFFA), le Haut Conseil Culturel Franco-Allemand (HCCFA), ou encore le Conseil des ministres franco-allemands (CMFA), institué en janvier 2003.
N’oublions pas non plus la chaîne ARTE (Association relative à la télévision européenne), créée en 1992.
arte | lancement 1992par danu888vdoLongtemps, le rapprochement franco-allemand a aussi coïncidé avec un encouragement aux élèves français à apprendre la langue de Goethe. Selon des chiffres officiels, 36% des élèves français apprenaient l’allemand en 1970. Mais depuis, l’influence de l’allemand n’a cessé de décroître. En 1995, seuls 20% des élèves avaient choisi cette langue, ils n’étaient que 13,5 % en 2001. A noter cependant un frémissement, puisqu’en 2009, le taux était remonté à 15,4%. Outre-Rhin, la désaffection du français est tout aussi patente.
… Mais un moteur en panne. La situation de l’allemand est un peu le symbole d’un certain désamour entre les deux pays. A Berlin, une certaine condescendance vis-à-vis de la France, considérée comme incapable de se réformer, s'est installée ces deux dernières années à la faveur d'une conjoncture économique plus favorable. En France, la crainte du colosse allemand, pays de loin le plus peuplé de la zone euro, semble avoir ressurgi. Diverses études montrent d'ailleurs la persistance des clichés entre les deux pays, avec d'un côté l'Allemagne "efficace" et de l'autre la France du "bien vivre".
"L'étroite coopération entre les deux pays" ne fut "jamais une évidence, mais a toujours dû être retravaillée par les responsables politiques des deux côtés du Rhin", rappelait récemment le ministre allemand des Affaires étrangères, Guido Westerwelle. Il est vrai que la relation entre les deux pays est très dépendante de la relation entre ses dirigeants. Il y eut l’impulsion donnée par Charles de Gaulle et Konrad Adenauer, mais c’est surtout entre 1982 et 1995 que le couple fut le plus actif, grâce à la surprenante proximité entre le socialiste François Mitterrand et le conservateur Helmut Kohl. L’image de leurs mains liées lors d’un hommage aux victimes de la bataille de Verdun, en 1984, est ainsi restée dans les mémoires.
Une relance en 2013 ? Pour l’heure, François Hollande et Angela Merkel, s’ils travaillent ensemble, semblent ne s’apprécier que modérément. Un réchauffement pourrait toutefois subvenir après le 22 septembre 2013, date des élections législatives en Allemagne. Une victoire de la gauche siérait forcément au président français. Et rendrait la collaboration plus aisée.