La République fédérale allemande, première puissance économique européenne, ne peut ignorer les aléas de son voisin français. D’autant que, depuis le début de la crise, les deux nations sont à la manœuvre pour faire évoluer l’Union européenne. La presse allemande accorde donc une grande place à la perte du AAA français, sans oublier de rappeler que l’Hexagone a longtemps repoussé des réformes que l’Allemagne a déjà entreprises.
"Sarkozy inquiet pour son emploi à l’Elysée"
Le principal hebdomadaire allemand, Der Spiegel, ne fait pas dans la demi-mesure et pense déjà aux échéances électorales. "Sarkozy inquiet pour son emploi à l’Elysée", écrit l’hebdomadaire en Une de son site Internet, avant d’indiquer que l’opposition va prendre un malin plaisir à souligner que le président de la République français "ne mérite plus l’étiquette de protecteur de la nation".
Tout en soulignant que le gouvernement a commencé à dédramatiser la situation avant Noël, le Spiegel estime que la perte du AAA constitue pour Nicolas Sarkozy un contrecoup sur trois terrains : ce dernier est fragilisé "tant le plan économique que politique et personnel".
"Pour Nicolas Sarkozy, cette dégradation risque de se traduire par la fin de son séjour à la présidence. 99 jours avant les élections outre-Rhin, il va devenir difficile pour le gouvernement de considérer cette décision de Standard & Poor’s comme sans importance", renchérit le quotidien Die Welt.
L’UE affaiblie par ricochet
Pour Focus, l’autre grand hebdomadaire allemand, la dégradation de la note française "met aussi en péril le parapluie européen", c’est-à-dire tout le mécanisme de solidarité mis en place pour limiter les effets de la crise de la dette. La France, deuxième économie européenne, est l'un des principaux garants du fonds de secours européen (FESF). Cette dégradation va donc réduire les marges de manœuvre du FESF.
"La crise de l'euro s'aggrave. Le sauvetage de la monnaie va devenir plus cher également pour la République fédérale", estime par ailleurs le quotidien populaire Bild.
Ce n'est pas pour autant l'apocalypse
Interrogé par le quotidien Frankfurter Rundschau, le chef économiste de la Commezbank, Jörg Krämer, tient néanmoins à dédramatiser la situation. "Ce n’est pas la solvabilité de la France qui est remise en cause, mais plutôt celle de l’Espagne et de l’Italie", souligne-t-il , avant de pronostiquer que les retombées pour la France seront limitées, le Japon et les Etats-Unis ayant survécu sans problème à la perte de leur note AAA.
Même son de cloche du côté du quotidien conservateur Frankfurter Allgemeine Zeitung (FAZ), qui écrit que "les dégâts économiques devraient rester limités (...), les investisseurs considérant la France déjà depuis un certain temps comme un pays solide de deuxième choix".
Conclusion d'Angela Merkel : il reste "encore un long chemin avant que la confiance des investisseurs soit rétablie", mais la chancelière "souligne qu'il ne s'agit que (des décisions) d'une agence parmi trois".