Cette poignée de main passe mal. Au procès de l'ancien SS Oskar Göring, une victime de la Shoah est allée vendredi à la rencontre de l'ancien comptable d'Auschwitz entre 1942 et 1944 actuellement jugé en Allemagne. Elle l'a salué et remercié de parler ouvertement de son rôle au sein de l'appareil nazi. Le geste d'Eva Kor, survivante américaine et partie civile au procès, a suscité la colère d'avocats d'autres victimes. "Au nom des 49 autres victimes représentées", Cornelius Nestler et Thomas Walther reprochent à la vieille dame de 81 ans de "toujours plus ostensiblement" se mettre en scène et de remettre en question leur plainte, rapporte Der Spiegel.
I am sharing with you my face to face meeting with Oskar Groening the former Nazi guard. Two old people reaching out pic.twitter.com/XlooNvPpQ1— Eva Mozes Kor (@EvaMozesKor) 23 Avril 2015
"Merci de parler". Lors d'une émission de télévision sur la chaîne ARD, Eva Kor a tenu à expliquer son geste, "que personne ne comprend", a-t-elle reconnu. "J'ai rencontré Oskar Gröning, me suis présentée et ai tendu ma main. Il a attrapé mon bras et s'est évanoui", a décrit la survivante sur Twitter. "Même si tous les nazis sont pendus pour leurs crimes, ma vie sera toujours la même", a confié celle qui a été cobaye du Dr. Mengele, aux côtés de sa sœur jumelle décédée.
Alors la survivante "a remercié [Oskar Göring] pour avoir pris sa part de responsabilité". L'ancien comptable nazi a en effet reconnu avoir participé à la machine d'extermination, mais refuse d'être considéré comme coupable. Pour Eva Kor, la seule solution est aujourd'hui de "demander [aux anciens criminels] de dire aux jeunes néonazis ce qui s'est réellement passé". La victime a également exhorté "tous les nazis qui sont toujours en vie" de "venir et partager votre explication, et rendez publique votre parole sur ce qui s'est passé" pour convaincre les "jeunes néonazis que nous, les survivants, nous [n'avons pas] tout inventé". Eva Kor s'était déjà fait connaître par le passé après avoir adopté le petit-fils d'un haut dignitaire nazi.
Ces explications n'ont fait qu'attiser la colère des autres victimes. "Nous ne pouvons pas pardonner à M. Gröning sa participation au meurtre de nos proches et de 299.000 autres personnes", ont-ils partagé, "Encore plus quand il se sent libre de toute faute pénale". Si Oskar Gröning a demandé pardon pour sa "faute morale", il refuse d'être jugé coupable de complicité de 300.000 meurtres.
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