"Un haussement d’épaules blasé". C’est ainsi que Matthew Fraser résume dans un éditorial diffusé sur la chaîne américaine CNN
la réaction française à l’affaire David Petraeus, l’ex-directeur de la CIA contraint à la démission après la révélation de ses infidélités. Le scandale a rebondi avec l’implication du général John Allen, chef de la coalition en Afghanistan mais, résume Matthew Fraser, "les Français ne voient pas où est le problème. Après tout, ce n’est que du sexe".
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"Il est impossible d’imaginer un dirigeant politique français démissionner en raison d’une indiscrétion extraconjugale. Si cette règle était en vigueur, le Parlement français serait quasiment vide", tacle l’auteur de cette tribune, qui est professeur de communication à l’Université américaine de Paris.
Une façon de "rabaisser" les États-Unis
Le Monde, qui a noté que l’affaire était vite passée des pages du respectable New York Times à celle du tabloïd The New York Post, en prend pour son grade et se voit qualifié de "journal de gauche intellectuel et suffisant". La France attribue les grands scandales sexuels à l’américaine à un certain "puritanisme", une façon de "rabaisser les États-Unis" et de marquer "la supériorité culturelle française", selon Matthew Fraser. "Les Français, par contraste, sont matures et sophistiqués, jamais choqués ou titillés par la riche complexité des tentations de la vie", écrit-il.
Sauf que pour lui, la société française a une "relation ambigüe" avec la vérité. "Quand le sujet tourne autour des indiscrétions sexuelles de hauts dirigeants politiques, on peut compter sur l’indifférence des médias, car les cercles médiatique et politique sont souvent intimement liés, professionnellement, socialement et sexuellement", dénonce-t-il, citant notamment le cas de l'ex-président François Mitterrand.
Revenant à l’affaire Petraeus, Matthew Fraser note que les Français diront "qu’ils ne veulent pas vraiment savoir. Ce n’est pas étonnant : quand cela se passe en France, on ne le leur dit pas".
Rachida Dati et Valérie Trierweiler
Évoquant les "bacchanales de la vie politique française", Kelly McParland fait une analyse presque similaire dans les colonnes du journal canadien The National Post. En France, note-t-il, si la presse parle aujourd’hui un peu plus des histoires de sexe de ses dirigeants, "elle ne les condamne pas, tant que personne ne subit de mauvais traitements".
L’éditorialiste cite le cas de l’ex-ministre Rachida Dati, qui a lancé une procédure de reconnaissance en paternité. Une affaire même pas qualifiée de scandale, "car en France ce n’en est pas un". Et l’auteur d’égrener, un rien réprobateur, la liste des conquêtes supposées de l’ancienne garde des Sceaux l’année où elle est tombée enceinte.
Le journal poursuit en évoquant le cas de François Hollande, qui a "largué la mère de ses quatre enfants [Ségolène Royal] pour une journaliste arrogante comme Valérie Trierweiler". Cela "pourrait heurter des sensibilités, mais comme M. Hollande n’a jamais été marié à Mme Royal, ce n’est rien du tout".