Acquitté du meurtre de sa belle-mère "au bénéfice d'un doute suffisant" en juin, le généticien français Laurent Ségalat voit depuis jeudi son affaire réexaminée en appel par le Tribunal cantonal de Lausanne, en Suisse. Vendredi, le tribunal peut confirmer le verdict délivré en première instance par le tribunal criminel de Renens, dans le canton de Vaud, ou demander à ce dernier de rejuger l'affaire. Par ailleurs, les parties peuvent faire appel devant le tribunal fédéral. Retour sur une affaire en forme de casse-tête judiciaire.
"Elle est morte". Le 9 janvier 2010, peu avant 22 heures, Laurent Ségalat, alors âgé de 45 ans, appelle la police. Péniblement, en quelques mots, le généticien lâche : "elle est morte", relatait, à quelques semaines du procès en première instance, le journal France-Soir.
L'homme explique aux enquêteurs que la femme de son père, Catherine Ségalat, 64 ans, serait morte accidentellement en chutant dans les escaliers du "Moulin", la maison paternelle située à Vaux-sur-Morges, sur les hauteurs de Lausanne. Mais très vite, la police cantonale penche pour une affaire criminelle : le crâne de la victime a été fracturé à trois reprises et porte les stigmates d'un objet contondant. Le suspect est tout désigné : Laurent Ségalat .
Des éléments troublants et des questions sans réponse. Il faut dire que le comportement du Français dans les heures qui ont suivi le drame interpelle. Pourquoi, avant l'arrivée des enquêteurs, le généticien a-t-il déplacé le corps de sa belle-mère ? Pourquoi a-t-il a ensuite pris le soin de nettoyer les projections de sang ? Pourquoi a-t-il également changé de chemise ?
Comment justifier, comme l'a finalement démontré l'autopsie, le fait d'avoir attendu trois heures avant d'appeler les secours ? Comment expliquer que ses bras soient recouverts de griffures et que son ADN ait été retrouvé sous les ongles de sa belle-mère ?
Seule certitude, la mort n'est pas accidentelle. En juin, à l'issue de sept jours d'audience étalés sur deux semaines, la plupart de ces questions étaient restées sans réponse. L'accusation n'a pu prouver la culpabilité de Laurent Ségalat ni même réussi à dégager un véritable mobile. Lui a toujours clamé son innocence.
Seule certitude à l'issue du procès pour la cour, la victime n'est pas morte accidentellement en chutant dans un escalier.
Un homme d'un "haut niveau de dangerosité". Jeudi, au premier jour du procès en appel, le procureur général a requis 16 ans de prison contre Laurent Ségalat, "un dissimulateur", qui montre un très grand sang-froid" et qui "présente un haut niveau de dangerosité" estimant que ce "meurtrier" s'était "acharné sur sa belle-mère".
Sera-t-il présent vendredi ? Depuis son acquittement, après deux ans de détention provisoire, Laurent Ségalat, chercheur au CNRS à Lyon, réside à Thonon, en France. Il bénéficiait d'un sauf-conduit pour la première journée du procès, rendant impossible toute arrestation d'office jeudi. Lors de l'audience, il a exprimé son "intention" d'être présent vendredi à 16h00 à la lecture du verdict.
Le procureur a demandé qu'il soit immédiatement interpellé s'il n'est pas relaxé, en raison du "risque de fuite". S'il est absent, il ne risque pas d'être envoyé en Suisse, la France n'extradant pas ses ressortissants dans un tel cas.