L'INFO. Laurent Fabius continue de clamer que "l'argent public" n'a pas servi à libérer les quatre ex-otages d'Arlit, libérés mardi et arrivés en France mercredi. Pourtant, selon les informations d'Europe 1, INFO E1 - La France a bien versé une rançon "target="_blank" >une rançon de 20 à 25 millions d'euros a bien été payée. Comment cette somme a pu être payée ?
>>> Gwendoline Debono, grand reporter à Europe 1, décrypte le mécanisme complexe de la remise de la rançon et de la libération des otages :
Un contrôle de l'argent. Le constat de base est simple : les preneurs d’otages préfèrent plutôt être payés en cash. Pour pouvoir faire face au versement de sommes exorbitantes, des unités combattantes d'Al-Qaïda au Maghreb islamique se sont équipées "depuis longtemps de détecteurs de faux billets. Lorsque l’argent est récupéré, il est toujours contrôlé avant de procéder à l’échange avec les otages", explique la journaliste d'Europe 1 qui a suivi de près ce dossier des otages.
Un bout de papier contre des coordonnées GPS. Pour récupérer l'argent, Aqmi utilise la technologie de la géolocalisation. "Lors de la libération, les otages sont conduits dans un endroit secret, sécurisé. On les laisse seuls avec de quoi tenir quelques jours : un peu d'eau, un peu à manger. Les ravisseurs relèvent la position GPS et c'est cela qu'ils échangent contre l'argent : un bout de papier avec des coordonnées géographiques", assure Gwendoline Debono. "Une fois que tout est OK, les intermédiaires récupèrent les otages grâce à ces indications. Si les ravisseurs considèrent qu'il y a un problème, ils ne donnent pas la position GPS et ils retournent simplement chercher les otages là où ils les ont laissés", décrypte la journaliste.
Enterrer ou mettre l'argent dans une voiture. Une fois que l'argent est récupéré, les djihadistes doivent le conserver. Et ce n'est pas une mince affaire : "il n'y a pas de banque d’Al-Qaida dans le désert. Les djihadistes cachent l'argent sous le sable, ou dans des carcasses de voitures. Même principe : on relève la position géographique. Ça s’appelle un plot GPS, et on y retourne dès qu’on en a besoin", explique Gwendoline Debono.
Les otages ont une cote pour Aqmi. Dans cette affaire des otages d'Arlit, les sommes atteignent des sommets. "Ça peut paraitre cynique mais c'est une réalité : il y a une cote, une sorte d'argus de l'otage qui change en fonction du pays, en fonction du groupe auquel appartiennent les ravisseurs", décrypte la journaliste. "Aujourd'hui, si vous êtes enlevé au Sahel par AQMI, vous êtes aux mains d'un groupe qui a fait du rapt une industrie et qui a quasiment des tarifs établis : on aura beaucoup de mal à vous faire sortir pour moins d'un million d'euros, et le prix pourra largement atteindre les 10 millions", assure Gwendoline Debono.
Et le "marché inhumain" de l'otage grimpe depuis plusieurs années. "Si vous vous mettez dans la tête des ravisseurs, un otage, ce n'est pas une vie, c'est un placement", explique-t-elle. Au Sahel, l'otage européen est en quelques sorte une action en bourse qui grimpe depuis 10 ans : "en 2003, 14 otages étaient libérés pour 5 millions d'euros. Aujourd’hui, c'est le prix d'un seul".
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