L’INFO. La salle d’audience était bondée. Djokhar Tsarnaev, l’auteur présumé du double attentat de Boston du 15 avril dernier, a comparu mercredi pour la première fois devant la justice. Lors de cette brève audience, le jeune homme de 19 ans, d’origine tchétchène, s'est vu signifier les 30 chefs d’accusation retenus contre lui, dont 17 sont passibles de la peine de mort ou de la réclusion à perpétuité. Mais Tsarnaev a plaidé non coupable.
"Non coupable". L'audience, dite d'"arraignment", a duré seulement sept minutes. Le visage de Tsarnaev portait encore des traces de traumatisme, notamment à l'oeil gauche, et il portait un plâtre au bras gauche. En tenue de prisonnier orange, pieds et mains entravés, tignasse toujours aussi indisciplinée, il a inlassablement répété "non coupable", d'une voix grave, à mesure qu'on lui lisait les chefs d'inculpation, dont ceux d'"utilisation d'une arme de destruction massive ayant causé la mort" et "attentat dans un lieu public ayant causé la mort". Son procès n'est pas attendu avant de longs mois.
Des victimes dans la salle. Les victimes de ce double attentat qui a fait trois morts et quelque 260 blessées ont donc pu entrevoir l’accusé pour la première fois. Toutes avaient été prévenues de l'audience et une centaine d’entre elles y ont assisté. Parmi les proches de victimes, Liz Norden, mère de deux fils de 33 et 32 ans qui ont du être amputés chacun d'une jambe. "Je veux savoir pourquoi", a-t-elle expliqué."Je ne comprends pas comment on peut vivre dans ce pays et penser ainsi", a-t-elle ajouté.
"Il a besoin d’une coupe de cheveux et d’une douche. Il n’avait pas l’air bien. Ça ne m’a pas fait changer d’avis sur lui. Je veux qu’il croupisse pour le restant de sa vie en prison, qu’il souffre autant qu’ils nous a fait souffrir", a affirmé au micro d'Europe 1 une victime des frères Tsarnaev qui a perdu une jambe dans l’attentat. "Je voulais voir l’homme qui a abattu si froidement quatre personnes. Je n’ai pas vu le remord et la nervosité que je m’attendais chez quelqu’un dans sa situation", a assuré de son côté un policier, présent à l’audience et interrogé par Europe 1.
Quelques supporters. Une poignée de personnes soutenant l'accusé étaient également présentes, affirmant son innocence. "J'ai fait ma propre enquête, pour moi c'est une manipulation du FBI", expliquait Duke Latouf, venu spécialement de Las Vegas. "Je ne vois pas de preuve", ajoutait aussi Karina Figueroa, venue de New York, avec deux petites affiches dont l'une appelant à "innocenter Jahar", le surnom de l'accusé.
Il comparaît seul. Djokhar Tsarnaev est détenu depuis le 19 avril dans une prison médicalisée, à l’ouest de Boston. L’adolescent a en effet été blessé lors de sa capture, après deux jours d’une intense chasse à l’homme dans toute l’agglomération. Les autorités l’accusent d’avoir préparé et fait exploser, avec son frère aîné Tamerlan, deux bombes artisanales placées dans des cocottes-minute à proximité de la ligne d'arrivée du marathon de Boston. Mercredi, Djokhar Tsarnaev sera seul devant la juge Marianne Bowler, puisque Tamerlan, 26 ans, considéré comme le plus radical des deux frères, a été tué le 18 avril par la police.
"Il avait l’air stressé et confus… C’est juste un enfant. Il a suivi son frère et c’est tellement triste", a affirmé un ami de la famille, présent à l’audience et interrogé par Europe 1.
Un adolescent sous influence ? Mercredi, l’avocate de Djokhar Tsarnaev devrait plaider non coupable et mettre en avant l’influence du frère aîné sur le cadet, explique CNN. Mais un élément central du dossier risque de compliquer cette stratégie : Djokhar Tsarnaev a laissé une note dans le bateau où il avait trouvé refuge lors de sa fuite. "Le gouvernement américain tue nos civils innocents. Je ne peux pas supporter de voir ce mal rester impuni. Nous musulmans, sommes un seul corps, vous faites du mal à l’un de nous, vous nous faites du mal à tous", a écrit le jeune homme, en pleine cavale désespérée, ajoutant : "Je n’aime pas tuer des civils innocents. L’islam l’interdit […] mais arrêtez de tuer nos innocents et nous arrêterons".