Une fois de plus et sans surprise, le président algérien a remporté l'élection présidentielle vendredi. Il a obtenu 81,53% des voix, contre 12,18% pour son adversaire, Ali Benflis. Affaibli par des ennuis de santé, Abdelaziz Bouteflika, artisan de la réconciliation après la guerre civile, briguait, à l'âge de 77 ans, un quatrième mandat. Au risque d'apparaître comme un homme accroché au pouvoir.
Ministre à 25 ans. Né le 2 mars 1937 à Oujda, au Maroc, d'une famille originaire de Tlemcen, dans l'ouest algérien, Abdelaziz Bouteflika a rejoint dès 1956 l'Armée de libération nationale (ALN) en lutte contre la France. A l'indépendance, à seulement 25 ans, il est devenu ministre des Sports et du Tourisme, sous la présidence d'Ahmed Ben Bella, avant d'hériter rapidement, en 1963, du portefeuille de la diplomatie, qu'il a conservé jusqu'en 1979.
En juin 1965, il a soutenu Houari Boumediene, alors ministre de la Défense, qui a renversé Ben Bella. S'affirmant le dauphin de Boumediene, dont il a prononcé en larmes l'oraison funèbre en décembre 1978, il a pourtant été écarté. Il a alors choisi l'exil à Dubaï ou encore à Genève. Abdelaziz Bouteflika est finalement revenu comme candidat à la présidence en avril 1999, et s'est retrouvé seul en lice après le retrait de ses six adversaires convaincus qu'il y aurait des fraudes.
Artisan de la réconciliation. Élu à la présidence en avril 1999 dans un pays en pleine guerre civile, "Boutef", comme l'appellent familièrement ses compatriotes, s'est employé à rétablir la paix après un conflit ayant fait quelque 200.000 morts, selon des sources officielles. En septembre 1999, il a obtenu un oui massif au référendum sur la loi de la "Concorde civile", qui amnistie les islamistes armés n'ayant pas commis de crimes de sang et de viols et se soumettant à l'autorité de l'Etat. La loi entraînera la reddition de milliers d'islamistes.
Un ancien ministre, en poste de 1999 à 2002, se souvient d'un homme "versatile" et craint par ses collaborateurs. "Il était tellement méprisant que ses chefs de gouvernement n'osaient jamais prendre la parole lors des conseils des ministres", indique-t-il.
Toujours impeccable en costume trois-pièces. Accusé par ses détracteurs de n'être qu'une marionnette de l'armée, Bouteflika, ancien officier de l'Armée de libération nationale, avait dès son élection voulu afficher son indépendance vis-à-vis de cette puissante institution en lançant sa célèbre phrase "je ne suis pas un trois-quarts de président". Après avoir été récemment accusé dans la presse de vouloir diviser l'armée, entre d'un côté les renseignements et de l'autre l'état-major, pour mieux la contrôler, il a qualifié de "fictifs" les conflits au sein de cette institution.
Toujours impeccablement vêtu d'un costume trois-pièces et cravate même en pleine canicule, Abdelaziz Bouteflika a été reconduit en 2004, puis en 2009 grâce à une révision de la Constitution supprimant la limitation du nombre de mandats présidentiels. En 2011, alors que le Printemps arabe balayait plusieurs vieux dirigeants, il a rapidement annoncé des réformes, jugées cependant très insuffisantes par l'opposition.
Il brille... par son absence. Après 15 ans à la tête du pays, il détient déjà le record de longévité pour un président algérien. Sans compter les seize années passées comme ministre, presque entièrement à la tête de la diplomatie. A la suite d'un AVC il y a un an, Abdelaziz Bouteflika a été hospitalisé pendant près de trois mois à Paris. Depuis son retour mi-juillet, il ne bouge presque plus de chez lui. Il ne s'est pas exprimé en public ces deux dernières années.
Le 3 mars, lui, qui jadis était un tribun hors pair, s'exprimant aussi bien en français qu'en arabe, a annoncé, d'une voix à peine audible, sa candidature en déposant son dossier au Conseil constitutionnel. Son directeur de campagne, Abdelmalek Sellal, a cependant assuré début avril qu'il allait "de mieux en mieux". Pourtant c'est un homme affaibli, en fauteuil roulant qui est allé voter, jeudi, à Alger.
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