C’est un chantier à 13 milliards de dollars, mobilisant plus de 10.000 ouvriers, qui a été stoppé mardi par une décision d’un tribunal brésilien. Celui du troisième plus grand barrage en construction dans le monde, à Belo Monte, au Nord du Brésil. Les travaux pharaoniques sont suspendus car, selon la justice, "les indigènes n'avaient pas été consultés avant le début de la construction. (…) En 2005, quand le parlement brésilien a approuvé ce chantier, il a exigé une étude d'impact environnemental postérieure au lancement des travaux et non préalable comme l'ordonne la loi", a expliqué le tribunal.
Les Indiens des tribus environnantes devront donc être auditionnés par les parlementaires avant que les travaux ne puissent reprendre. Norte Energia, le consortium public en charge des travaux, peut toutefois faire appel. L’organisme a indiqué attendre la notification officielle du jugement pour y répondre sur le plan juridique. En attendant, s’il s’aventurait à poursuivre le chantier, la sanction serait salée : 250.000 dollars… par jour.
Sting et James Cameron mobilisés
Belo Monte a gagné à, ses dépens une notoriété mondiale avec la campagne menée contre le barrage par des célébrités comme le chanteur Sting et le réalisateur James Cameron. Le chef indien brésilien Raoni, 82 ans, connu dans le monde entier pour son combat en faveur de l'Amazonie et des peuples indiens, avait également demandé "l'arrêt" de la construction du barrage lors de la conférence sur le développement durable de l'ONU en juin à Rio de Janeiro.
Quelque 150 Indiens ont par ailleurs récemment occupé pendant trois semaines l'un des quatre chantiers du barrage pour exiger que le consortium tienne ses engagements envers leurs communautés. "C'est une décision historique pour le pays et pour les peuples (du fleuve) Xingu. C'est une grande victoire qui montre que Belo Monte n'est pas un fait acquis. Nous sommes très heureux et satisfaits", a réagi Antonia Melo, coordinatrice du Mouvement Xingu Vivo.
Mis en service entre 2015 et 2019
En construction sur le fleuve Xingu, le barrage est censé fournir 11.233 MW, soit 11% de la capacité actuelle du Brésil. Son édification entraînera l'inondation de 502 km2. Et même si les terres des populations indiennes locales ne sont pas touchées, leur mode de vie risque d'être affecté car elles tirent leur subsistance de la pêche. Le gouvernement prévoit des investissements de 1,2 milliard de dollars d'ici à la fin des travaux pour réduire les impacts négatifs de la construction. La première turbine devrait entrer en opération en 2015 et la dernière en 2019. Il est normalement prévu que d'ici la fin de l'année 12.000 ouvriers travaillent jour et nuit sur le chantier, et jusqu'à 22.000 en 2013.
Cet ouvrage gigantesque symbolise aussi les dilemmes de la sixième économie mondiale. Le Brésil a en effet réduit drastiquement la déforestation de l'Amazonie et affirme avoir la source d'énergie la plus propre parmi les grandes économies. Mais le pays s'est aussi lancé dans de gigantesques projets d'infrastructure, dont des barrages et des routes en Amazonie pour accompagner son développement. Des projets dont l’impact négatif sur l’environnement est inévitable.